**SOC.**
**ELECTIONS**
CH.B
**COUR DE CASSATION**
Audience publique du **13 janvier 2010**
Cassation partielle sans renvoi
Mme COLLOMP, président
Arrêt n° 131 **FS-P+B**
Pourvoi n° E **09-60.208**
**REPUBLIQUE FRANCAISE**
**AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS**
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la **Fédération des syndicats du personnel
de la banque et de l'assurance (FSLPBA-CGT)** , dont le siège est 263 rue de
Paris, 93515 Montreuil cedex,
contre le jugement rendu le 30 avril 2009 par le tribunal d'instance de Paris
13e chambre (contentieux des élections professionnelles), dans le litige
l'opposant :
1°/ à la société Natixis Asset Management (NAM), dont le siège est 21 quai
d'Austerlitz, 75634 Paris cedex 13,
2°/ à la société Natixis Global Asset Management, dont le siège est 21 quai
d'Austerlitz, 75634 Paris cedex 13,
3°/ à la société Natixis multi manager (NMM), dont le siège est 13 rue des
Italiens, 75009 Paris,
4°/ à la société Natixis épargne financière, dont le siège est 21 quai
d'Austerlitz, 75634 Paris cedex 13,
5°/ à la société Natixis épargne financière gestion, dont le siège est Nef
Gestion, 21 quai d'Austerlitz, 75634 Paris cedex 13,
6°/ à la Fédération des employés et cadres Force ouvrière, dont le siège est
28 rue des Petits Hôtels, 75010 Paris,
7°/ à M. Aa A, domicilié Fédération des employés et cadres, 28
rue des Petits Hôtels, 75010 Paris,
8°/ à la société UNSA Natixis, Union nationale des syndicats autonomes
Natixis, dont le siège est 30 avenue Pierre Mendès France, 75013 Paris,
9°/ à la société SNB-CFE-CGC, Syndicat national de la banque et du crédit,
dont le siège est 2 rue Scandicci, 93000 Pantin,
10°/ à la Fédération des banques et sociétés financières CFDT, dont le siège
est 47-49 avenue Bolivar, 75950 Paris cedex 19,
11°/ au syndicat CFTC Confédération française des travailleurs chrétiens, dont
le siège est 132 rue du Faubourg Saint-Denis, 75010 Paris,
12°/ à M. Ab Ac, domicilié … … … …, … …,
13°/ à Mme Ad Ae, domiciliée La Sablonnière, 77220 Favières,
14°/ à M. B Af, domicilié … … … … …, …
…,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de
cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation
judiciaire, en l'audience publique du 2 décembre 2009, où étaient présents :
Mme Collomp, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire
rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, Mmes Morin, Perony, M. Béraud, Mme
Lambremon, conseillers, Mmes Agostini, Darret-Courgeon, conseillers
référendaires, M. Cavarroc, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre
;
Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire, les
observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la Fédération
des syndicats du personnel de la banque et de l'assurance CGT, les conclusions
de M. Cavarroc, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la
loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 2122-3 du code du travail ;
Attendu, selon l'article précité, que lorsqu'une liste commune a été établie
par des organisations syndicales la répartition entre elles des suffrages
exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales
concernées lors du dépôt de leur liste, et à défaut, à parts égales entre les
organisations concernées ; qu'il en résulte que la répartition des suffrages,
lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu'elle ne soit pas
à parts égales, doit être portée tant à la connaissance de l'employeur qu'à
celle des électeurs de l'entreprise ou de l'établissement concerné avant le
déroulement des élections et qu'à défaut, la répartition s'opère à parts
égales ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que les syndicats Force ouvrière et SNB
CFE-CGC ont présenté une liste commune lors des élections professionnelles qui
se sont déroulées au sein de l'établissement Natixis Asset Management (NAM) le
27 novembre 2008 ; que les syndicats ont informé l'employeur d'une répartition
des suffrages à hauteur de 55 % pour le syndicat FO et de 45 % pour le
syndicat SNB-CFE-CGC ; que la liste commune a obtenu au sein de
l'établissement 19,65 % des suffrages exprimés ; que le 19 janvier 2009, le
syndicat FO a procédé à la désignation d'un délégué syndical au sein de
l'établissement NAM et d'un délégué syndical au sein de l'Unité économique et
sociale NAM ; que contestant la représentativité du syndicat FO au regard des
suffrages obtenus par la liste commune, la Fédération CGT des syndicats du
personnel de la banque et de l'assurance (le syndicat CGT) a saisi le tribunal
d'instance en annulation de ces désignations ;
Attendu que pour valider la désignation par le syndicat FO d'un délégué
syndical au sein de l'établissement NAM, le tribunal d'instance énonce que les
syndicats de la liste commune avaient lors du dépôt de la liste informé
l'employeur d'une répartition des suffrages à hauteur de 55 % au profit du
syndicat FO, qui peut ainsi se prévaloir de 10,81 % des suffrages exprimés au
sein de l'établissement, sans qu'il puisse être reproché à la direction de la
société de n'avoir pas fait procéder à l'affichage ou à la diffusion de la
modalité de répartition des suffrages entre le syndicat FO et le syndicat CFE-
CGC alors qu'elle n'y était pas tenue ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal a violé le texte précité ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a validé la désignation de M.
A par le syndicat FO en qualité de délégué syndical de l'établissement
NAM, le jugement rendu le 30 avril 2009, entre les parties, par le tribunal
d'instance de Paris 13e ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Annule la désignation de M. A en qualité de délégué syndical de
l'établissement NAM ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les défendeurs à payer
à la Fédération CGT des syndicats du personnel de la banque et de l'assurance,
la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le
présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du
jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par
le président en son audience publique du treize janvier deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils,
pour la Fédération des syndicats du personnel de la banque et de l'assurance
CGT.
Ce moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR validé la désignation de
Monsieur Aa A en qualité de délégué syndical FORCE OUVRIERE de
l'établissement NAM effectuée par la Fédération FORCE OUVRIERE le 19 janvier
2009 en ce que cette dernière justifiait de sa représentativité syndicale au
sein de l'établissement NAM ;
AUX MOTIFS QUE la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la
démocratie sociale et réforme du temps de travail pose de nouvelles conditions
d'audience électorale pour les organisations syndicales afin de valablement
procéder à la désignation de délégués syndicaux ; qu'en effet, aux termes de
l'article .2143-3 du code du travail, chaque organisation représentative dans
l'entreprise ou l'établissement de cinquante salariés ou plus, qui constitue
une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections
professionnelles qui ont recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au
premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la
délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le
nombre des votants, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter
auprès de l'employeur, dans la limite fixée à l'article L. 2143-12 du Code du
travail ; que pour être représentatif dans l'entreprise ou l'établissement,
l'article L. 2122-1 du même code prévoit que l'organisation syndicale doit
satisfaire aux critères de l'article L. 2121-1 du code du travail et doit
avoir recueilli 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières
élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du
personnel ou à défaut des délégués du personnel quel que soit le nombre de
votants ; Que les désignations litigieuses étant intervenues postérieurement
au résultat des élections professionnelles du 27/11/2008, pour lesquelles la
date fixée pour la négociation du protocole préélectoral était postérieure à
la publication de loi nouvelle, soit le 21 août 2008, ces nouvelles
prescriptions légales doivent recevoir application en conformité avec les
dispositions transitoires de la loi du 20 août 2008 (articles 11 et 13) ; que
sur la détermination de la représentativité de la Fédération des employés et
cadres FORCE OUVRIERE Que la circulaire DGT n° 20 du 13 novembre 2008 du
Ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la
solidarité, citée par les parties requérantes, est venue préciser le cas des
entreprises à établissements multiples ; qu'il est indiqué expressément que "
la représentativité au niveau des établissements se fonde sur les résultats
des élections des comités d'établissement " et que " la représentativité d'un
syndicat au niveau de l'entreprise (pour la désignation d'un délégué syndical
central par exemple ou la négociation d'un accord au niveau central de
l'entreprise), se calcule par l'addition de l'ensemble des suffrages obtenus
par le syndicat dans l'ensemble des établissements quel que soit le
pourcentage qu'il a obtenu par établissement " ; que les désignations
litigieuses étant destinées à prendre effet soit au sein de l'établissement
NAM, soit au niveau de l'unité économique et sociale NAM, il convient en
conséquence d'apprécier la représentativité de la Fédération des employés et
cadres FORCE OUVRIERE au regard des préconisations exposées dans la circulaire
précitée.
Au sein de NAM
Que s'agissant de l'établissement NAM, la Fédération des employés et cadres
FORCE OUVRIERE et le syndicat SNB/CFE-CGC ont choisi de faire liste commune
pour les élections au comité d'entreprise et pour les élections des délégués
du personnel, tel que le prévoit l'article L 2122-3 nouveau du code du travail
; que cette liste a fait l'objet d'une communication à la direction des
ressources humaines de la société NAM le 6/11/2008 à 11 h 45, selon la mention
portée sur la liste, soit dans le respect des dispositions prévues au
protocole préélectoral qui fixaient une date limite de dépôt des candidatures
au 6/11/2008 à 12 heures ; que cette liste prévoit expressément s'agissant des
élections au comité d'entreprise, que " l'audience syndicale FO : 55%
-SNB/CFE-CGC : 45 % sauf à ce que la liste commune remporte de 20% à 23 % des
suffrages et remette donc en cause la représentativité d'un des deux
syndicats, auquel cas les deux organisations syndicales adopteraient un
partage de type légal à 50/50 " ; que l'article L 2122-3 précité dispose que
la répartition entre organisations syndicales des suffrages exprimés se fait
sur la base indiquée par elles lors du dépôt de leur liste, et à défaut
d'indication de cette répartition, elle se fait à part égale entre elles ;
qu'aucun texte légal ni aucune disposition du protocole préélectoral n'impose
de règles de publicité à cette répartition ; qu'il ne saurait donc être
reproché à la direction de la société NAM de n'avoir pas fait procéder à
l'affichage ou à la diffusion de la modalité de répartition des suffrages
entre la Fédération des employés et cadres FORCE OUVRIERE et le syndicat
SNB/CFE-CGC, alors qu'elle n'était tenue, selon les dispositions adoptées dans
le cadre de l'accord préélectoral, que de procéder à l'affichage des listes
des candidats sur les panneaux prévus à cet effet, obligation dont elle s'est
acquittée ; qu'au demeurant, il résulte des pièces versées aux débats, que la
Fédération des employés et cadres FORCE OUVRIERE et le syndicat SNB/CFE-CGC
n'ont pas souhaité voir diffuser auprès des électeurs et des autres
organisations syndicales les modalités de répartition des suffrages, qui
n'apparaissent ni dans les professions de foi de candidats, ni sur les tracts
syndicaux ; qu'en tout état de cause, la sincérité du scrutin ne saurait être
remise en cause dans la mesure où chaque électeur, informé de l'existence
d'une liste commune, était à même d'interroger les organisations syndicales
intéressées sur la clé de répartition envisagée.
qu'eu égard à ce qui précède, et par application des dispositions de l'article
L 2122-3 précitées, la répartition des suffrages exprimés entre les deux
organisations syndicales doit se faire sur la base indiquée par elles lors du
dépôt de leur liste commune, à savoir 55 % pour FO et 45% pour SNB CFE-CGC ;
qu'il résulte des deux procès-verbaux des élections des membres titulaires au
comité d'établissement NAM tenues le 27/11/2008, les éléments suivants :
- collège ouvriers, employés : suffrages exprimés 96
liste FO/ SNB CFE-CGC 27
- collège cadres : suffrages exprimés 484
liste FO/ SNB CFE-CGC 87
TOTAL Suffrages exprimés : 580
Suffrages liste FO/SNB CFE-CGC : 114 soit 19,65 % des suffrages
Que compte tenu d'une répartition à hauteur de 55% des suffrages pour FO et de
45 % pour le SNB/CFE-CGC, la Fédération des employés et cadres FO obtient 62,7
suffrages exprimés sur 580 soit 10, 81 % des suffrages exprimés au sein de
l'établissement NAM ; qu'en considération de ces résultats, la Fédération des
employés et cadres FO justifie de sa représentativité au niveau de
l'établissement NAM au regard des critères posés à l'article L. 2122-1 du code
du travail comme ayant recueilli plus de 10% des suffrages exprimés ; que la
désignation de monsieur Aa A en qualité de délégué syndical au
sien de l'établissement NAM doit donc être validée, étant remarqué qu'il
remplit par ailleurs les conditions posées à l'article L 2143-3 du code du
travail (plus de 10 % des voix au 1° tour sur son nom et dans son collège),
élément non contesté.
ALORS QU'AUX termes de l'article L. 2122-1 du Code du travail, sont
représentatives dans l'entreprise ou l'établissement les organisations
syndicales qui satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 et qui ont
recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières
élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du
personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de
votants et que selon l'article L. 2122-3 du même Code, lorsqu'une liste
commune a été établie par des organisations syndicales, la répartition entre
elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les
organisations syndicales concernées lors du dépôt de leurs listes, à défaut
d'indication, la répartition des suffrages se fait à part égale entre les
organisations concernées ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions
que pour qu'un syndicat puisse se prévaloir d'un taux d'audience électoral
égal à 10% en se fondant sur une répartition inégalitaire des suffrages
s'étant portés sur une liste commune, cette répartition doit avoir été portée
à la connaissance des salariés et des organisations syndicales de l'entreprise
au moment des élections, à défaut de quoi l'appréciation du taux d'audience ne
peut s'effectuer que sur la base de la répartition égalitaire prévue par la
loi ; que le Tribunal d'instance qui a constaté que la société NAM n'avait
fait procéder ni à l'affichage, ni à la diffusion de la modalité de
répartition des suffrages entre la Fédération des employés et cadres FORCE
OUVRIERE et le syndicat SNB/CFE CGC, ces derniers syndicats n'ayant pas
souhaité la voir diffusée, et qui a néanmoins considéré que compte tenu de la
répartition, indiquée lors du dépôt de leur liste commune, à hauteur de 55%
pour FO et de 45% pour le SNB/CFE-CGC, la Fédération des employés et cadre FO
avait obtenu 10,81% des suffrages exprimés au sein de l'établissement NAM et
justifiait en conséquence de sa représentativité, a violé les articles L.
2122-1 et LL. 2122-3 du Code du travail.