Cass. soc., 04-03-2009, n° 08-60.436, FS-P+B, Rejet



SOC.

ELECTIONS

CM

COUR DE CASSATION

Audience publique du 4 mars 2009

Rejet

Mme COLLOMP, président

Arrêt n° 418 FS P+B

Pourvoi n° H

08-60.436

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la société ISS sécurité, société par actions simplifiée, dont le siège est Paris,

contre le jugement rendu le 19 mai 2008 par le tribunal d'instance de Paris 16e (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant

1°/ à M. Jérôme Y, domicilié Rueil-Malmaison
à M. Stéphane X, domicilié Stains,

3°/ au Syndicat national des employés de la prévention et de la sécurité (SNEPS) CFTC, dont le siège est Paris,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 janvier 2009, où étaient présents Mme Collomp, président, M. Béraud, conseiller rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, Mmes Morin, Perony, conseillers, Mmes Pecaut-Rivolier, Darret-Courgeon, conseillers référendaires, M. Allix, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Béraud, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société ISS sécurité, de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de M. Y, de M. X, et du syndicat national des employés de la prévention et de la sécurité CFTC, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris, 19 mai 2008), que par lettre du 19 février 2008, le syndicat CFTC des employés de la prévention et de la sécurité a notifié à la société ISS sécurité la désignation de M. Y en qualité de délégué syndical ; que la société a contesté cette désignation au motif que l'effectif de l'entreprise ne permettait la désignation que d'un seul délégué syndical et que le syndicat CFTC avait déjà procédé à la désignation d'un tel délégué ;

Attendu que la société ISS sécurité fait grief au jugement de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le moyen

1°/ qu'est régulière et ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement garanti par les articles 6 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, et 1, 5 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la décision de l'employeur de s'opposer dorénavant à la désignation, par l'un quelconque des syndicats de l'entreprise, d'un délégué syndical tant que le nombre ne sera pas redescendu à celui fixé par la loi ; qu'en jugeant cependant que la société ISS sécurité ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée par le syndicat CFTC, au seul prétexte que d'autres syndicats disposaient eux aussi de deux délégués syndicaux, sans constater que les désignations surnuméraires de ces syndicats étaient intervenues postérieurement à la décision de l'employeur de remettre en cause la tolérance antérieure, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des textes précités et des articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412- 2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8 L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail ;

2°/ que si l'acceptation par l'employeur de désignations surnuméraires effectuées par certains syndicats l'oblige à accepter celles des autres, il n'en va pas de même lorsque l'existence des désignations surnuméraires est le fruit d'une erreur, non créatrice de droit ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que c'était à la suite d'erreurs commises à la suite d'une réorganisation et d'une omission de sa part que des désignations surnuméraires étaient intervenues ; qu'en jugeant cependant que, quelles que soient les causes de ces désignations, elle ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée postérieurement par le syndicat CFTC, le tribunal d'instance a violé les articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412-2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8, L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 412-21 devenu l'article L. 2141-10 code du travail que si le nombre des délégués syndicaux dans l'entreprise ou l'établissement tel qu'il est fixé par la loi peut être augmenté par accord collectif, ni un usage de l'entreprise ou de l'établissement ni un engagement unilatéral de l'employeur ne peuvent modifier les dispositions légales correspondantes ; qu'il s'ensuit que l'employeur qui décide unilatéralement d'une telle augmentation peut unilatéralement décider de revenir à l'application des textes légaux qui n'ont pas cessé d'être applicables, sous réserve de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre tous les syndicats concernés et, pour répondre à l'exigence de loyauté qui s'impose en la matière, de les en informer préalablement ;

Que le tribunal devant lequel l'employeur n'alléguait pas avoir informé les syndicats concernés d'une décision de revenir à l'application des textes légaux préalablement à la désignation par le syndicat CFTC d'un second délégué a statué à bon droit ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société ISS sécurité IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR débouté la société ISS SÉCURITÉ de ses demandes et de l'AVOIR condamné à payer 1.000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS QU'il résulte des articles L. 412-13 et R. 412-2 du Code du travail que les organisations syndicales dans les entreprises qui ont un effectif compris entre 50 et 999 salariés peuvent désigner un délégué syndical ; qu'il est établi que l'effectif de la société ISS SÉCURITÉ est de 664 salariés et que le syndicat CFTC lui a notifié le 2 septembre 2005 la désignation de Monsieur X et le 19 février 2008 celle de Monsieur Y, en qualité de délégués syndicaux, ce qui est donc hors des dispositions légales ; que les pièces versées aux débats établissent par ailleurs que les syndicats CGT, CFDT et FO disposent quant à eux de 2 délégués syndicaux, par suite, d'après les dires d'ISS, d'erreurs et omissions de sa part (sic) ; qu'il n'en demeure pas moins que, quelles que soient les causes de ces doubles désignations, un employeur ne saurait, au nom du principe d'égalité de valeur constitutionnelle, refuser la désignation d'un délégué syndical dès lors qu'il l'a acceptée pour d'autres syndicats représentatifs ; qu'ainsi, si ISS SÉCURITÉ peut décider unilatéralement de revenir à l'application des textes légaux, cela doit se faire à la condition de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre les syndicats concernés, ce qui n'est guère le cas en l'espèce, puisque les textes légaux ne s'appliqueraient qu'à la CFTC ;

1. ALORS QU'est régulière et ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement garanti par les articles 6 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, et 1, 5 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la décision de l'employeur de s'opposer dorénavant à la désignation, par l'un quelconque des syndicats de l'entreprise, d'un délégué syndical tant que le nombre ne sera pas redescendu à celui fixé par la loi ; qu'en jugeant cependant que la société ISS SÉCURITÉ ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée par le syndicat CFTC, au seul prétexte que d'autres syndicats disposaient eux aussi de 2 délégués syndicaux, sans constater que les désignations surnuméraires de ces syndicats étaient intervenues postérieurement à la décision de l'employeur de remettre en cause la tolérance antérieure, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des textes précités et des articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412-2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8 L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail ;

2. ALORS QUE si l'acceptation par l'employeur de désignations surnuméraires effectuées par certains syndicats l'oblige à accepter celles des autres, il n'en va pas de même lorsque l'existence des désignations surnuméraires est le fruit d'une erreur, non créatrice de droit ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que c'était à la suite d'erreurs commises à la suite d'une réorganisation et d'une omission de sa part que des désignations surnuméraires étaient intervenues ; qu'en jugeant cependant que, quelles que soient les causes de ces désignations, elle ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée postérieurement par le syndicat CFTC, le tribunal d'instance a violé les articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412-2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8 L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail.