CA Versailles, 3e, 10-04-2008, n° 07/02482



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RÉPUBLIQUE ... A./ rie ve areffb

COUR D'APPEL

DE

VERS

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS sea

LE DIX AVRIL DEUX MILLE HUIT,

Code nac (ne

5ème chambre ARRÊT N' 56

REPU TE CONTRADICTOIRE DU 10 AVRIL 2008 R.G. N° 07/02482

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre

S.A. UCB PHARMA


NANTERRE
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP KEII\ GUTTIN JARRY, avoués - 1\1° du dossier

07000301

plaidant par Me RAVIT, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

AFFAIRE

****************

S.A. UCB PHARMA 1 Madame Marie-Elise Huguette X,le W épouse V C/ Tif Monsieur Eric V Matit- Dise Huguette f-. ri !e, de Lcirraide

,i.eiri e ?FR -1. Lit° épouse a il( ()IPUSE SUR MOS-dLE vi.,SE'' ' A 3/ Monsieur Henri W

4/ Madame Raymonde U épouse U
LUXEUIL LES BAINS

Décision déférée à la cour

Jugement rendu le 26 leprésentés par la SCP TUSET-CHOUTEAU, avoués -N° du dossier 2007t;'..),J3

Janvier 2007 par le plaidant par Me Martine VERDIER, avocat au barreau d'ORLÉANS Tribunal de Grande Instance de NANTERRE INTIMES N' chambre 2 IN" ItG - 03/11729 Si S.A.S.
RUEIL MALMAISO!'

prise en la personne de ses?, ;sentants légaux domiciliés en cette qi.alit é aucli..

siège

alleu nions exécutoires représentée parla SCP LEFLVRE TARDY et HONGRE BOYELDIEU, avoués

I. xpéchtions N" du dossier 270326 Copies plaidant par Me BOERINGER, avocat a.., barreau de PARIS délivrées le

à 10 Avkagee INTIMÉE

-SCP KEIME GUTTIN 6/ RAM JARRY 9 rue M. ...

-SCP NANCY

Composition de la cour

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mars 2008, Madame BOURQUARD, Président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de

Madame Joëlle BOURQUARD, Président, Monsieur Marc REGIMBEAU, Conseiller, Madame Marie-Claude CALOT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats Madame Marie-Line PETILLAT

FAITS ET PROCÉDURE

Se prévalant de ce que l'adénocarcinome à cellules claires, diagnostiqué en 1986, est en relation directe avec la prise de distilbène par sa mère au cours de la grossesse dont elle est issue, Mme Marie Elise W épouse W a, par actes des 4 et 23 septembre 2003 et 25 mai 2005, assigné la société UCB PHARMA S.A., puis la société NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE S.A.S. en déclaration de responsabilité et indemnisation de son préjudice devant le tribunal de grande instance de Nanterre qui, a avant dire droit, par ordonnance du juge de la mise en état du 5 octobre 2004, désigné un collège d'experts et ensuite du dépôt du rapport d'expertise, le 8 mars 2006, a, par jugement rendu le 26 janvier 2007, déclaré commun à la RAM

- mis hors de cause la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE,

- déclaré la S.A. UCB PHARMA responsable, sur le fondement des articles 1165, 1382 et 1383 du code civil, de l'adénocarcinome à cellules claires dont a été atteinte Mme W Marie Elise épouse W,

- condamné la S.A. UCB PHARMA à payer à

- Mme W Marie Elise épouse W, la somme de 229.402 euros,

- Mme U Raymonde, la somme de 8.000 euros pour son préjudice moral,

- M. W Henri, la somme de 5.000 euros pour son préjudice moral,

- M. V Eric, la somme de 8.000 euros pour son préjudice moral,

- Ensemble aux consorts ..., 6.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- prononcé l'exécution provisoire,

- condamné la S.A. UCB PHARMA aux dépens comprenant les frais d'expertise.

Appelante de cette décision, la société UCB PHARMA S.A., aux termes de ses écritures déposées le 31 janvier 2008, conclut en son infirmation et elle

- à titre principal,

- vu l'absence de preuve de l'exposition in utero au Distilbène®,

- vu l'absence de production d'un document source démontrant que du Distilbène®, produit de la S.A. UCB PHARMA, a été délivrée à Mme Raymonde U durant sa grossesse ayant donné lieu à la naissance de Mme Marie-Elise V, vu les articles 31 et 32 du code de procédure civile,

- dire que la demanderesse ne rapporte pas la preuve de son exposition in utero au Distilbène®, produit de la S.A. UCB PHARMA,

- dire que M. et Mme V et M. et Mme W sont irrecevables en toutes leurs demandes, fins et conclusions à son encontre et les débouter de l'intégralité de leurs demandes,

- à titre subsidiaire, constater la prescription

1. de l'action de Mme Marie-Elise V - vu l'article 2270-1 du code civil,

- dire que le point de départ de la prescription, de l'action en responsabilité délictuelle doit être fixé, compte tenu des faits en l'espèce, à septembre 1986,

- dire qu'aucun acte interruptif ou suspensif de prescription n'est intervenu avant l'expiration, en septembre 1986, du délai de prescription,

- dire que l'action en responsabilité délictuelle introduite le 4 octobre 2003 à son encontre par Mme Marie-Elise V est donc prescrite et en conséquence déclarer irrecevables toutes les demandes de Mme Marie-Elise V à son encontre et l'en débouter,

- en toute hypothèse,

- constater que Mme Marie-Elise V était consolidée le 31 janvier 1991, concernant l'affection d'adénocarcinome à cellules claires,

- dire qu'aucun acte interruptif ou suspensif de prescription n'est intervenu avant le 31 janvier 2001,

- dire que l'action en responsabilité délictuelle introduite le 4 octobre 2003 à son encontre par Mme Marie-Elise V au titre de l'adénocarcinome à cellules claires est donc prescrite et en conséquence déclarer irrecevables toutes les demandes de Mme Marie-Elise V à son encontre et l'en débouter,

2. des actions de MM. W et V - vu l'article 2270-1 du code civil,

-3-

- dire que le point de départ de la prescription, de l'action en responsabilité délictuelle, doit être fixé, compte tenu des faits en l'espèce, à septembre 1986,

- dire qu'aucun acte interruptif ou suspensif de prescription n'est intervenu avant l'expiration, en septembre 1986, du délai de prescription,

- dire que l'action en responsabilité délictuelle introduite le 6 juin 2006 à son encontre par MM. FERREROFERRERO et PESENTIPESENTI est donc prescrite et en conséquence déclarer irrecevables toutes leurs demandes à son encontre et l'en débouter, 3. de Mme Raymonde U - vu l'article 2270-1 du code civil,

- dire que l'impossibilité d'agir de Mme Raymonde U à son égard a cessé en 1986,

- dire qu'à cette date la prescription trentenaire n'était pas expirée et que Mme Raymonde U devait agir avant 1995,

- dire qu'aucun acte interruptif ou suspensif de prescription n'est intervenu avant cette date,

- dire que l'action en responsabilité contractuelle introduite par Mme Raymonde U le 6 juin 2006 à son encontre est irrecevable comme prescrite et déclarer irrecevables toutes ses demandes à son encontre et l'en débouter,

- à titre infiniment subsidiaire,

1. préjudices économiques . ITT

- dire et juger que l'indemnité allouée au titre de l'ITT ne saurait excéder 5.000 euros ; . IPP

- vu les montants alloués par la jurisprudence pour un taux d'IPP et un âge, au jour de la consolidation, correspondant à celui de la demanderesse ;

- dire et juger que la preuve d'un retentissement professionnel n'est pas rapportée ; - dire et juger que la valeur du point d'IPP ne saurait excéder 2.000 euros ;

- dire et juger en conséquence que l'indemnité allouée à Mme Marie-Elise T au titre de l'IPP ne saurait excéder 80.000 euros ;

2. préjudices personnels

- dire et juger que toute analogie avec le préjudice spécifique de contamination est mal fondée, -4-

- en conséquence, rejeter toute demande au titre d'un prétendu préjudice spécifique et dire et juger que l'évaluation des préjudices personnels de Mme Marie-Elise T devra se faire au regard des chefs de préjudice définis à l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985,

. Pretium doloris

- dire et juger que l'indemnité allouée au titre de ce chef de préjudice, évalué à 5,5/7, ne saurait excéder 2.000 euros ;

. Préjudice esthétique

- dire et juger que l'indemnité allouée au titre de ce chef de préjudice, évalué à 4/7, ne saurait excéder 4.500 euros ;

. Préjudice d'agrément

- dire et juger qu'il n'y a pas lieu de retenir une notion de préjudice fonctionnel d'agrément ; en toute hypothèse, dire et juger que le préjudice allégué au titre du préjudice fonctionnel d'agrément est déjà indemnisé au titre de l'IPP ;

- en conséquence, déboirter Mme M. C. '... de sa demande au titre de ce ches de oréjudice

. Préjudice sexuel

- dire et juger que l'indemnité allouée au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 5.000 euros ;

. Préjudice d'établissement

- dire et juger que la situation personnelle et familiale de Mme Marie-Elise T ne permet pas de carketeiriser un préjudice d'établissement ;

- en conséquence, débouter Mme Marie-Elise T de sa demande à ce titre ; * Préjudice de M. V

- dire et juger que l'indemnité allouée à M. ... au titre de son préjudice moral par ricochet ne saurait excéder 3.000 euros ;

3. Préjudices de M. et Mme W

a. demande de Mme Raymonde U au titre d'un préjudice moral

- dire et juger que les préjudices invoqués par Mme Raymonde U constituent en réalité un seul et même préjudice moral ;

- en conséquence, dire et juger que l'indemnité allouée à Mme Raymonde U au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 3.000 euros ;

-5-

b. demande de M. W au titre d'un préjudice moral

- dire et juger que l'indemnité allouée à M. W au titre de ce chef de préjudice ne saurait excéder 2.000 euros ;

Mme Marie Elise W épouse W, M. Eric V, Mme Raymonde U épouse U et M. Henri W, aux termes de leurs écritures déposées le 13 décembre 2007, concluent, vu les articles 1165, 1382, 1383 et 1353 du code civil, à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité du laboratoire S.A. UCB PHARMA et fait droit à leur demande sur le fondement de l'article 700 du code .de procédure civile et en ce qu'il a indemnisé justement les parents et l'époux de Mme ... PESENTI et débouté le laboratoire S.A. UCB PHARMA de toutes ses exceptions et moyens tenant à l'exposition au DES ou à la prescription de l'action. Par voie d'appel incident, ils demandent de condamner le laboratoire la S.A. UCB PHARMA au paiement des sommes suivantes en réparation de l'entier préjudice de Mme ...

- recevoir Mme Marie-Elise W épouse W en son appel incident,

y faisant droit, vu les articles 1115 382, 1163 du. carie

- vu l'article 1353 du code civil,

- confirmer pour partie le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité du laboratoire S.A. UCB PHARMA et a fait droit aux demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement en ce qu'il a indemnisé justement les parents et l'époux de Mme ...,

- débouter le laboratoire S.A UCB PHARMA de toutes ses exceptions et moyens tenant, à l'exposition au DES ou à la prescription da- l'action,

- infirmant pour le surplus et statuant à nouveau, condamner le laboratoire S.A. UCB PHARMA au paiement des sommes ci-dessus détaillées en réparation de l'entier préjudice de Mme ...

. Créance RAM 0,00 euro

. Incidence professionnelle 10.000,00 euros

. DFT (ITT) 6.000,00 euros

. Souffrances endurées 45.000,00 euros DFP (IPP) 124.000,00 euros

. Préjudice esthétique permanent 8.000,00 euros

. Préjudice d'agrément 15.000,00 euros

. Préjudice sexuel 40.000,00 euros

. Préjudice d'établissement 8.000,00 euros

. Préjudice matériel et financier 15.402,00 euros

-6-

- condamner le laboratoire S.A. UCB PHARMA au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le laboratoire S.A. UCB PHARMA aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise,

- à titre infiniment subsidiaire et par impossible,

- déclarer le laboratoire S.A. UCB PHARMA et la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE solidairement responsables du dommage subi par Mme Marie-Elise W épouse W et tenus de le réparer,

- condamner le laboratoire S.A. UCB PHARMA et la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE solidairement au paiement de sommes ci-dessus détaillées en réparation de l'entier préjudice de Mme Marie-Elise W épouse W,

- condamner le laboratoire S.A. UCB PHARMA et la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE solidairement au paiement de

. 4.000 euros au titre du préjudice propre et personnel de Mme W,

. 4.000 euros au titre du préjudice spécifique d'affection lié au préjudice rporel et intime de sa fille,

. 5.000 euros au titre du préjudice propre et personnel de M. W, . 8.000 euros au titre du préjudice propre et personnel de M. V,

- condamner le laboratoire S.A. UCB PHARMA et la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE solidairement au règlement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE SAS., aux termes de ses écritures déposées le 25 octobre 2007, conclut, vu les articles 1382 et 2270-1 du code civil,

- Sur l'action de Mme Marie Elise W épouse W - à titre principal,

- à la réformation du jugement et à ce qu'il soit dit que l'action engagée par celle-ci à son encontre est prescrite et au débouté de l'ensemble des demandes de Mme Marie Elise W épouse W à son encontre,

- à titre subsidiaire,

- à la confirmation du jugement en ce qu'il la mise hors de cause et au débouté de l'ensemble des demandes de Mme Marie Elise W épouse W à son encontre, -7-

- Sur l'action de Mme Raymonde U sur son préjudice propre et personnel

- à titre principal,

- à ce qu'il soit dit que l'action engagée par celle-ci à son encontre est prescrite, - à titre subsidiaire,

- à ce que ses demandes soient déclarées mal fondées en l'absence de preuve de l'exposition in utero de Mme Marie-Elise W épouse W au Stilboestrol Borne et au débouté de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

- Sur les actions de Mme Ravmonde W. M. Henri W et M. Eric V en réparation de leur préjudice moral par ricochet

- a ce qu'elles soient déclarées irrecevables comme prescrites, à titre principal - et, à titre subsidiaire,

- à ce que ses demandes soient déclarées mal fondées en l'absence de preuve de l'exposition in utero de Mme Marie-Elise W épouse W au Stilboestrol Borne et au débouté de l'ensemble de leurs demandes à son encontre,

- en tout état de cause, il sollicite la condamnation de la S.A. UCB PHARMA, appelante, à lui payer une indemnité de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux entiers dépens.

Assignée selon acte délivré le 13 juillet 2007 à personne habilitée à le recevoir, la RAM n'a pas constitué avoué.

MOTIFS ET DÉCISION

- Sur la preuve de l'exposition in utero de Mme V au Distilbène®

Considérant que la charge de la preuve des faits qu'il invoque incombe au demandeur, en l'espèce, Mme Marie Elise V ;

Que pour que l'action en responsabilité intentée par Mme Marie Elise V puisse prospérer, il lui revient de démontrer, cumulativement, qu'elle a été exposée à la molécule DES, sous la forme de celle fabriquée par l'un au moins des laboratoires en la cause, et que cette molécule est à l'origine de son dommage, à savoir sa pathologie ;

Que la preuve du rôle causal de la molécule DES dans la pathologie de Mme Marie Elise V, peut valablement résulter des analyses et avis des experts, au cours de l'expertise qui a été diligentée ; qu'en l'espèce, s'agissant du lien de causalité entre l'exposition in utero au DES et le développement de la pathologie cancéreuse, le collège expertal, s'appuyant sur la base d'une analyse exhaustive de toute la littérature qui lui a été communiquée, affirme de façon formelle, -8-

- qu'après vérification approfondie, il n'a identifié aucune description d'un adénocarcinome vaginal de type de celui présenté par la requérante chez une jeune femme non exposée in utero aux estrogènes,

- qu'aucun travail épidémiologique sérieux n'a identifié le moindre facteur de risque dans l'apparition de tableaux tumoraux tels que présenté par Mme Marie-Elise T,

Qu'il ajoute, " on peut donc affirmer sans la moindre ambiguïté que le DES a bien été la cause directe de la pathologie tumorale " ;

Qu'il reste en conséquence à Mme Marie-Elise T à démontrer qu'elle a été exposée in utero au Distilbène®, produit fabriqué par la société UCB PHARMA S.A., dont elle recherche, à titre principal, la responsabilité et dès lors qu'elle impute, à titre subsidiaire, la responsabilité des conséquences de sa pathologie à la société UCB PHARMA S.A. et la société NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE S.A.S., de prouver qu'elle a été exposée concomitamment ou successivement au Distilbène® et au stilbestrol Borne, produit fabriqué par la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE ;

Que la S.A. UCB PHARMA et la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE contestent que cette preuve soit rapportée en l'occurrence ;

Que s'agissant d'un fait juridique, la preuve en est libre, et peut donc se

;.,.,faire par écrit, par témoignages, dont la force probante et la pertinence sont laissées par la loi à l'appréciation souveraine des juges, ou par présomptions, lesquelles ne peuvent être retenues, suivant l'article 1353 du code civil, qu'à condition d'être graves, précises et concordantes ;

Considérant cependant, que le dossier médical de Mme Raymonde U épouse U n'ayant pas été retrouvé près de 40 ans après les faits, aucun certificat médical de prescription n'est produit ; qu'en effet, en réponse à la demande du conseil de sa fille, Mme Raymonde U épouse U a indiqué qu'il lui était impossible de fournir son dossier gynécologique du fait du décès du Docteur ... et qu'elle n'avait gardé aucune des ordonnances de ce médecin ;

Que bien qu'ayant adressé le 8 mars 2004, par l'intermédiaire de son conseil une lettre à la pharmacie MAIREY-LORETZ à Luxeuil les Bains, relevant notamment, " vous évoquiez au mois de janvier 2004 que vous ne pouviez accéder à la demande de Mme Marie-Elise T au seul motif que procédant à des travaux, vos archives étaient inaccessibles " et informant ce pharmacien qu'à défaut de réponse de sa part, elle envisageait de le contraindre en justice à la production de l'ordonnancier, elle ne justifie pas avoir conduit à terme sa démarche ni que celle-ci se soit révélée infructueuse et ne produit en conséquence aucun justificatif de prescription de distilbène® durant la grossesse dont elle est issue ;

Que la demanderesse ne peut utilement se prévaloir de la copie de son carnet de santé dès lors qu'il n'est pas contesté que la mention manuscrite " dosages hormonaux, distilbène, 5 comprimés dès le 2'''s mois, prothéolysat " portée sous la rubrique " examens au cours de la gestation " dans ce document, a été portée, à une époque indéterminée, par Mme Raymonde U épouse U, sa mère, et n'a en conséquence pas force probante ;

-9-

Que Mme Marie-Elise T se réfère à deux attestations rédigées par sa mère, l'une datée du 18 février 2003, soit dans les six mois précédents l'assignation selon laquelle cette dernière " atteste sur l'honneur avoir été sous traitement par le distilbène à hormone de synthèse (petite boite ronde rose avec inscriptions, petits comprimés ronds genre dragées rose) durant sept mois d'octobre 1964 jusqu'à début avril 1965, ma fille est née le 20 avril 1965. Ce traitement m'avait été prescrit par le Docteur ..., gynécologue à Luxeuil les Bains ", la seconde établie le 20 janvier 2004, soit en cours de procédure, aux termes de laquelle Mme Raymonde U épouse U confirme cette prescription par le Docteur ... et précise en PS " j'avais lu dans un magazine que ce Distilbène risquait d'occasionner des problèmes gynécologiques aux enfants dont les mères avaient pris ce remède pour les grossesses à risques, qu'il avait été supprimé en Amérique" ; qu'il convient d'estimer que ces deux documents sont à eux-seuls d'une faible force probante, dès lors qu'il émane de la propre mère de la demanderesse, qui de surcroît est elle-même partie à la procédure et de leurs dates de rédaction par rapport à la procédure en cours ;

Que Mme Marie-Elise T se fonde ensuite sur deux attestations établies par le Docteur ..., l'une datant du 15 avril 2007, soit postérieurement au prononcé du jugement selon laquelle ce praticien certifie que depuis sa première consultation en 1980, Mme Raymonde U lui a déclaré avoir pris. CISTILBENE pendars, la grossesse de sa fille Marie-Elise, la seconde établie' le 1 ..vivier '2008, soit avant veille du prono scé ue l'ordonnance de clôture, document reprenant les mêmes termes et ajoutant " prescription que son médecin traitant m'a confirmée par la suite " ; qu'il convient d'estimer que ces attestations, qui ne font que reprendre les propos que Mme Raymonde U auraient tenus, une quinzaine d'année après sa grossesse et qui n'émanent pas du médecin prescripteur, sont dépourvues de force probante, que s'agissant plus précisément de la seconde attestation, il convient de relever, outre l'interrogation soulevée par sa particulière tardiveté, que la circonstance selon laquelle le Docteur ... ajoute que,les dires de Mme Raymonde U lui ont été confirmés par le médecin traitant de /tette dernière ne par met pas davantage d'établir la réalité de la prescription du produit ncriminé au cours de sa grossesses litiyie -,e lés lors qu'en l'absence de précision du nom du médecin traitant, d peut s'agir d'un médecin généraliste devant lequel Mme Raymonde U aurait elle-même toit état de cette prescription et que plus, cet ajout ne précise en aucun cas qu'il s'agii du médecin gynécologue ayant suivi Mme Raymonde U durant sa grossesse ;

Considérant que l'intimée aise également aux débats un document émanant du Docteur ..., gynécologue obstétricien, lequel déclare avoir suivi, en 1986, Mme W W et l'avoir opérée d'un adénocarcinome à cellules claires et ajoute " cette pathologie, découverte chez une jeune femme de 21 ans est une pathologie iatrogène. Elle est liée à la prise des distilbène que la mère avait absorbé dans les premiers mois de gestation de M. E.. Toute cette partie des antécédents de la mère de Mme Raymonde U avait été documenté par le Docteur ..., qui m'avait confiée cette patiente en m'expliquant les antécédents " ;

Qu'aux termes d'un autre écrit daté du 5 janvier 2008, ce même médecin déclare n'avoir eu connaissance d'aucun générique du distilbène dans sa pratique professionnelle et l'enseignement qu'il a pu recevoir, au niveau de la faculté de Strasbourg puis de Besançon ; que les seules prescriptions et explications faites

-10-

concernaient le distilbène et qu'il n'a découvert l'autre générique de l'époque que lorsque l'avocat de Mme Raymonde U a pris contact avec lui ;

Qu'il convient d'estimer que ces éléments qui se réfèrent aux dires du Docteur ..., fondés sur les propres assertions de Mme Raymonde U, mère, non contemporaines à sa grossesse et qui n'émanent pas du médecin prescripteur sont dépourvus de force probante ;

Considérant que le dossier de suivi médical de Mme ... fait mention à plusieurs reprises à son exposition in utero au distilbène, et notamment dans,

- un compte rendu opératoire du service de gynécologie obstétrique du 17 septembre 1986 par le Docteur ... suivi d'un commentaire du 13 octobre 1986 (Docteur ...), " à noter que la mère a été sous Distilbène pendant toute sa grossesse ",

- un bilan d'observation de l'institut G. ... mentionnant, consultation du 18/10/1986 - Résumé de sortie Dr L. - antécédents prise de Distilbène de la mère pendant la grossesse, dne correspondance du 7 octobre '1991 du Docteur ... au Docteusr-; -9AGNANI indiquant avoir opéré Mme W pour un carcinome du vagin à celkiler. claires (suite à du distilbène in utero),

- un bilan d'observation de l'institut G. ... mentionnant, consultation du 16/03/95 " il est indispensable dans le contexte d'exposition au DES - ACC que la patiente soit vue tous les six mois... ",

- une lettre adressée le 15 avril 1996 par la clinique de la Roseraie d'Epinal au Docteur ... qui indique au titre des antécédents gynécologiques de Mme FERRERO-PtSENTI, " découverte d'un adénocarcinome vaginal consécutif à l'utilisation de Distilbène chez la mère pendant le début de la. grossesse " Que l'analyse de ces documents démontrent qu'ils ne sont fondés sur aucune source contemporaine à la grossesse de Mme Raymonde U, mère, mais sur les seuls propos tenus par cette dernière et rapportés ensuite par le médecin le Docteur ... dont il n'est pas contesté qu'il ne l'a pas suivie au cours de cette grossesse, qu'en conséquence, les éléments contenus dans le dossier médical de Mme Marie-Elise T sont dépourvus de toute force probante de son exposition in utero au distilbènell, ;

Qu'au surplus, la S.A. UCB PHARMA produit des éléments de preuve de ce que la marque " distilbène ", par sa notoriété, était souvent assimilée au terme générique du produit, le diethylstilbestrol ou DES et que le terme "distilbène", était employé, même par des spécialistes, au sens générique, que les articles de presse, même spécialisé, faisaient référence au " distilbène " pour désigner l'un ou l'autre des deux produits, notamment en raison de la position dominante sur le marché de cette hormone, soit entre 80 et 90 %, alors qu'à la même époque les produits des deux laboratoires étaient concurremment commercialisés, de sorte que cette mention n'est

-11-

pas significative de la marque administrée ; qu'au demeurant, il n'est pas indifférent d'observer que Mme Raymonde U, dans son attestation du 20 janvier 2004, se réfère précisément à la lecture d'un article sur le distilbène et les risques occasionnés par ce produit ;

Considérant que les experts, ont pour leur part d'abord relevé que l'exposition in utero au DES était documenté par le carnet de santé de l'enfant M. E. et le témoignage de la mère le carnet de vaccination, puis, ayant pris acte des similarités d'écritures entre l'attestation de Mme Raymonde U, mère, et le carnet de santé, ils se sont ensuite fondés sur le dossier hospitalier de Mme Marie-Elise T tenant pour acquise l'exposition au Distilbène (estimant que ce point avait dû faire l'objet de vérification par l'équipe soignante) pour juger acquise cette exposition ; qu'étant préalablement rappelé qu'il n'entrait pas dans la mission qui leur avait été confiée de documenter l'exposition au Distilbène, il convient de relever qu'il ne saurait être déduit des observations émises par les experts, sur la base d'éléments que la cour a écarté comme dépourvus de force probante, aucune preuve de l'exposition effective de Mme Marie-Elise T au distilbène® ;

Considérant que les attestations et pièces versées aux débats ne constituent donc pas des preuves certaines de l'exposition de Mme W W au distilbène® durant la grossesse de sa mère, ni davantage les présomptions graveS, précises et concordantes, exigées par l'article 1353 du code civil ; que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a dit que Mme W W rapportait la preuve de son exposition au distilbène et déclaré la S.A. UCB PHARMA responsable de l'adénome à cellules claires dont elle a été atteinte ;

Considérant qu'à titre subsidiaire, Mme W W soutient, que, étant admis qu'elle a bien été exposée à la molécule litigieuse, mais étant supposé que l'identité exacte de ce produit, distilbène de la S.A. UCB PHARMA, ou stilbestrol Borne de la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE, soit restée ignorée la preuve en étant impossible, il resterait que ces deux laboratoires auraient chacun concouru au dommage subi par elle, engageant ainsi leur responsabilité solidaire, en commercialisant ensemble et au même moment, l'hormone de synthèse DES, sous ces deux noms différents, de sorte que ce serait nécessairement un produit fabriqué par l'une des marques, ou même les deux ensemble, qui serait en cause ;

Que Mme W W soulève ainsi le moyen tiré de la responsabilité solidaire des participants à une action collective ou commune ;

Que la S.A. UCB PHARMA réplique que les conditions d'une responsabilité collective ne sont pas remplies dans le cas de Mme W W ;

Que la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE oppose à titre principal la prescription de l'action et subsidiairement fait valoir que la preuve de l'exposition de Mme W W à son produit, condition de l'engagement de sa responsabilité, même solidaire, n'est pas rapportée ;

Mais considérant que le moyen d'irrecevabilité de la demande, tiré de la prescription, ne peut utilement prospérer dès lors qu'en matière d'indemnisation de

-12-

préjudice corporel comme en l'espèce, le délai de prescription court à compter de la date de la consolidation ;

Que les experts ont fixé la date de consolidation au 18 mai 2005, qu'en conséquence le délai de prescription n'est pas acquis ;

Que Mme Marie-Elise T ne verse aux débats aucun élément de nature à justifier de son exposition in utero au Stilbestrol Borne, produit commercialisé par la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE ;

Qu'elle sollicite que la S.A. UCB PHARMA et la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE soient déclarées solidairement responsables du dommage qu'elle subit ;

Mais considérant qu'en droit la notion d'action collective ou commune, ne peut trouver à s'appliquer, que dans les cas où tous les participants ont commis des fautes indissociables, ou des fautes connexes, ou une action concertée, chacun ayant contribué à la réalisation du dommage, ou, en d'autres termes, en relation avec le dommage ;

Qu'il n'existe aucune présomption de lien de causalité en cette matière ;

Qu'ainsi, si plusieurs chasseurs ont pu être reconnus solidairement responsables pour avoir causé un dommage unique dans leur action commune de tir, c'était en raison de l'existence d'une gerbe unique de plombs ayant causé le dommage ;

Qu'il incombe, en conséquence, à la cour de rechercher les éléments de preuve certaine d'une action collective ;

Qu'il n'est pas fait état par Mme W W de fautes connexes ou indissociables, ni d'une concertation des laboratoires en relation avec le dommage ;

Que le fait qu'ils aient tous deux mis sur le marché la molécule à l'origine du dommage, fait non contesté, ne peut pas en tenir lieu, ce fait n'étant pas en relation directe avec le dommage subi par Mme W W ;

Qu'il conviendrait que soit de plus établi, que les molécules DES qu'ils produisent, ont toutes deux concouru au dommage particulier subi par Mme W W, c'est à dire qu'elles lui ont toutes deux été administrées, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, aucun élément de preuve d'une administration du produit de la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE n'étant versé aux débats, et la cour ayant estimé, que les éléments de preuve de l'administration du distilbène® de la S.A. UCB PHARMA produits aux débats, étaient insuffisants ;

Que la preuve d'une action collective ou concertée n'étant pas rapportée, le moyen ainsi soulevé par les intimés, doit donc être jugé mal fondé ;

Que sans qu'il n'y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés, il convient d'estimer qu'à défaut pour Mme W W de rapporter la preuve d'une faute des laboratoires en relation avec son dommage, condition de l'engagement de leur responsabilité, elle ne peut qu'être déboutée de ses demandes aux fins de déclaration de responsabilité et d'indemnisation ;

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- Sur la demande au titre des frais irrépétibles

Considérant qu'il n'y a pas lieu en équité d'allouer une quelconque somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Sur les dépens

Considérant que les intimés qui succombent, doivent supporter les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 26 janvier 2007 par le tribunal de grande instance de Nanterre,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme Marie-Elise W épouse W, M. Eric V, Mme Raymonde U épouse U et M. Henri W de l'ensemble de leurs prétentions,

Rejette toutes autres demandes des parties, et notamment celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme Marie-Elise W épouse W, M. Eric V, Mme Raymonde U épouse U et M. Henri W aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise,

Dit que ces dépens pourront être recouvrés par les SCP KEIME GUTTIN JARRY, et LEFEVRE TARDY HONGRE BOYELDIEU, avoués de la S.A. UCB PHARMA et de la S.A.S. NOVARTIS SANTÉ FAMILIALE, pour la part les concernant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrét au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame J. ..., Président et par Madame M. ..., Greffier présent lors du prononcé, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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