SOC.
ELECTIONS
CM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 5 mars 2008
Cassation sans renvoi
Mme COLLOMP, président
Arrêt n° 456 FS P+B
Pourvoi n° U
07-60.305
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par la compagnie Corsair, société anonyme, dont le siège est Ajaccio, ayant un établissement principal Rungis,
contre le jugement rendu le 10 mai 2007 par le tribunal d'instance de Villejuif (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant
1°/ au syndicat CGT des personnels de la société Corsair international, dont le siège est Rungis
à M. Remi X, domicilié Plerin-sur-Mer, défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 30 janvier 2008, où étaient présents Mme Collomp, président, M. Béraud, conseiller rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, Mmes Morin, Perony, conseillers, Mmes Pécaut-Rivolier, Darret-Courgeon, conseillers référendaires, M. Cavarroc, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Béraud, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la compagnie Corsair, les conclusions de M. Cavarroc, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement attaqué, qu'après avoir unilatéralement permis aux syndicats représentatifs autres que les syndicats catégoriels constitués dans le secteur de l'aviation civile de désigner quatre délégués syndicaux au lieu des deux prévus par le code du travail, la société Corsair a, en mars 2004, décidé de remettre en cause cette mesure et a informé les syndicats intéressés qu'ils ne pourraient dorénavant procéder au remplacement des délégués antérieurement désignés qu'après que leur nombre soit redescendu à deux ; que par lettre du 12 mars 2007, le syndicat CGT a désigné M. X en qualité de délégué syndical suite au départ d'un des quatre délégués qui le représentait ;
Sur le moyen unique pris en sa première branche
Attendu que la société Corsair fait grief au jugement de l'avoir déboutée de son action tendant à l'annulation de la désignation de M. X, alors, selon le moyen, que la lettre de désignation d'un délégué syndical doit être signée à peine de nullité ; qu'en jugeant le contraire, le tribunal d'instance a violé les articles L. 412-11, L. 412-15, L. 412-16 et D. 412-1 du code du travail ;
Mais attendu que les formalités de l'écrit ne sont prescrites par l'article D. 412-1 du code du travail que pour faciliter la preuve de la désignation du délégué syndical ; que le défaut de signature de la lettre est dès lors sans incidence sur la validité de la désignation qu'elle notifie à l'employeur ;
Mais sur les deuxième et troisième branches
Vu les articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15 et L. 412-21du code du travail ;
Attendu que si le nombre de délégués syndicaux tels qu'il est fixé par la loi peut être augmenté par accord collectif, ni un usage de l'entreprise ni un engagement unilatéral de l'employeur ne peuvent modifier les dispositions légales correspondantes ; qu'il s'ensuit que l'employeur qui décide unilatéralement d'une telle augmentation peut unilatéralement décider de revenir à l'application des textes légaux qui n'ont pas cessés d'être applicables, sous réserve de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre tous les syndicats concernés ;
Attendu que pour débouter la société Corsair de sa demande tendant à l'annulation de la désignation de M. X, le tribunal retient que l'employeur ne pouvait pas décider unilatéralement du retour à l'application des textes légaux et que les modalités de réduction du nombre des délégués syndicaux créaient une situation pouvant être inégalitaire entre les syndicats concernés ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'est régulière et ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement garanti par les articles 6 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946 et 1, 5 et 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la décision de l'employeur de s'opposer dorénavant à la désignation, par l'un quelconque des syndicats concernés, d'un délégué syndical tant que leur nombre ne sera pas redescendu à celui fixé par la loi, le tribunal a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 10 mai 2007, entre les parties, par le tribunal d'instance de Villejuif ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Annule la désignation de M. X en qualité de délégué syndical ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille huit.