SOC.
PRUD'HOMMES
FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 30 janvier 2008
Cassation
M. CHAUVIRE, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt n° 215 F D
Pourvois n° au n° K 06-46.447
Q 06-46.474
JONCTION
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur les pourvois n° K 06-46.447 au n° Q 06-46.474 formés par la société Brandt industries, société par actions simplifiée, venant aux droits et obligations de la société anonyme Elco Brandt, dont le siège est Rueil-Malmaison, contre vingt-huit arrêts rendus le 27 octobre 2006 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale) dans les litiges l'opposant
1°/ à M. Bernard X, domicilié Château l'Abbaye,
2°/ à M. Farid W, domicilié Waziers,
3°/ à M. Stéphane V, domicilié La Gorgue
à M. Jean-Claude U, domicilié Orchies,
5°/ à M. Frédéric T, domicilié Roubaix,
6°/ à M. Hervé S, domicilié La Chapelle d'Armentières,
7°/ à M. Christophe R, domicilié Ranchicourt,
8°/ à M. Joseph Q, domicilié Avion
à M. Jean-Louis P, domicilié Wingles,
10°/ à M. Emmanuel O, domicilié Tressin
à M. Joël N, domicilié Flines-lez-Raches,
12°/ à M. Frédéric T, domicilié Baisieux
à M. Dominique M, domicilié Haubourdin,
14°/ à M. Dominique M, domicilié Wahagnies
à M. Hugues L, domicilié Ennevelin,
16°/ à M. Pascal K, domicilié Courrières
à M. Yves J, domicilié Liévin,
18°/ à M. Alain I, domicilié Herlies
à M. Didier H, domicilié Santes,
20°/ à M. Christian G, domicilié Tourcoing,
21°/ à M. Armando F, domicilié Hem
à M. Bruno E, domicilié Marcq-en-Baroeul,
23°/ à Mme Bernadette D, domiciliée Flers-en-Escrebieux
à M. Christian G, domicilié Hellemmes,
25°/ à M. Jean-Paul C, domicilié Faches Thumesnil,
26°/ à M. Philippe B, domicilié Houplin Ancoisne,
27°/ à M. Benoît AA, domicilié Villeneuve d'Ascq,
28°/ à M. Dominique M, domicilié Gondecourt,
29°/ à M. Francisque ZZ, pris en qualité d'administrateur judiciaire et co-commissaire à l'exécution du plan de la société anonyme Selnor, domicilié Neuilly-sur-Seine,
30°/ à la société Becheret et Thierry, société civile professionnelle, prise en qualité de représentant des créanciers et co-commissaire à l'exécution du plan de la société anonyme Selnor, dont le siège est Rueil-Malmaison,
31°/ à M. Didier H, pris en qualité d'administrateur judiciaire et co-commissaire à l'exécution du plan de la société anonyme Selnor, domicilié Nanterre ,
32°/ à la société Selnor, société anonyme, dont le siège est Lesquin,
33°/ au CGEA IDF Ouest (Paris-Yvelines-Hauts-de-Seine), dont le siège est Levallois-Perret , défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2007, où étaient présents M. Chauviré, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Linden, conseiller rapporteur, M. Béraud, conseiller, M. Leblanc, Mme Bobin-Bertrand, conseillers référendaires, M. Mathon, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Linden, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Brandt industries, venant aux droits de la société Elco Brandt, de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de MM. X, W, V, U, T, S, R, Q, P, O, N, T, M, M, L, K, J, I, ..., G, F, E, G, C, B, AA, M et de Mme D, les conclusions de M. Mathon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n° K 06-46.447 au n° Q 06-46.474 ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon les arrêts infirmatifs attaqués, que la société Selnor a établi en juin 2001 un projet de plan social prévoyant notamment des mesures d'incitation au reclassement interne et le versement, sous réserve de pouvoir justifier dans les trois mois suivant la rupture de son contrat de travail d'un reclassement effectif, d'une indemnité complémentaire à l'indemnité conventionnelle de licenciement ; que M. X et vingt-sept autres salariés ont demandé à bénéficier d'un congé sans solde et ont retrouvé un emploi externe entre juin et décembre 2001 ; que la société Selnor, placée en redressement judiciaire le 12 septembre 2001, a fait l'objet le 15 janvier 2002 d'un plan de cession partielle au profit de la société Elco Brandt, aux droits de laquelle vient la société Brandt industrie ; qu'un plan de sauvegarde de l'emploi a été élaboré le 29 janvier 2002, prévoyant le versement d'une indemnité additionnelle de licenciement par la société Elco Brandt aux salariés licenciés de la société Selnor, excepté ceux "qui sont soit en congé sans solde, soit en absence longue durée" ; que M. X et les vingt-sept autres salariés ont été licenciés par les administrateurs judiciaires de la société Selnor pour motif économique les 24 et 25 février 2002 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande au titre de l'indemnité additionnelle de licenciement ;
Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article L. 321-4-1 du code du travail ;
Attendu que pour faire droit à la demande, les arrêts retiennent qu'au moment de leur licenciement, les salariés étaient en position de congé sans solde et faisaient donc toujours partie de l'effectif de l'entreprise, de même que les autres salariés licenciés au même moment qui n'avaient pas, quant à eux, cherché leur reclassement externe ; que l'avantage pour les salariés du maintien à l'effectif de l'entreprise du fait de la position de congé sans solde jusqu'à leur licenciement était plus que largement compensé par l'avantage qui en résultait corrélativement pour l'employeur, puisqu'il permettait à ce dernier de ne plus avoir à rechercher lui-même le reclassement des salariés et, au moment du licenciement, de s'interroger sur les critères d'ordre, les salariés ayant par hypothèse retrouvé un autre emploi et ne devant donc plus être reclassés et étant dès lors nécessairement considérés comme devant être licenciés en priorité ; que l'exclusion du bénéfice de l'indemnité additionnelle de licenciement prévue par le plan social pour l'emploi du 29 janvier 2002, notamment pour les salariés en position de congé sans solde, était une mesure discriminatoire qui, dès lors, leur était inopposable ;
Attendu, cependant, que l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés s'il justifie que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique peuvent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage sont préalablement définies et contrôlables ;
Et attendu qu'un salarié qui se trouve en congé sans solde et a trouvé un emploi externe ne se trouve pas dans une situation identique à celle des autres salariés, la perte de son emploi ayant pour lui des conséquences moindres ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il existait une justification objective à la différence de traitement et que les règles déterminant l'octroi d'une indemnité additionnelle de licenciement répondaient aux conditions requises, la cour d'appel a violé le principe et le texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 27 octobre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille huit.