Cass. soc., 22-01-2008, n° 06-44.802, F-D, Rejet



SOC.

PRUD'HOMMES

S.L

COUR DE CASSATION

Audience publique du 22 janvier 2008

Rejet

M. BAILLY, conseiller le plus ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 68 F D

Pourvoi n° X

06-44.802

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la société Laboratoires Merck Sharp Dohme Chibert, société en nom collectif, dont le siège est Paris,

contre l'arrêt rendu le 27 juin 2006 par la cour d'appel de Riom (4e chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. Philippe Y, domicilié Talmont-Saint-Hilaire, défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 décembre 2007, où étaient présents M. Bailly, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Morin, M. Linden, conseillers, Mme Darret-Courgeon, conseiller référendaire, M. Allix, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Laboratoires Merck Sharp Dohme Chibert, de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de M. Y, les conclusions de M. Allix, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 27 juin 2006), que M. Y a été engagé par la société laboratoires Merck Sharp Dohme Chibert (société MSD) en 1964 ; qu'il a cessé ses fonctions en 2000 ; qu'estimant avoir été victime d'une discrimination dans le déroulement de sa carrière, M. Y a saisi le conseil de prud'hommes en 2003 d'une demande de dommages-intérêts ; que le conseil de prud'hommes a ordonné, avant dire droit, une expertise ;

Attendu que la société MSD fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le salarié a été victime de discrimination syndicale et de l'avoir condamnée au paiement de dommages et intérêts à ce titre alors, selon le moyen

1°/ que le panel établi par l'expert judiciaire avec l'accord des parties portait sur 12 salariés sélectionnés en fonction d'une période d'embauche donnée, de leur affectation à la filière production, et de diplômes déterminés ; que méconnaît les droits de la défense en violation des articles 8, 13 et 16 du nouveau code de procédure civile, l'arrêt qui fonde sa décision sur une comparaison sélective basée sur un autre critère tiré de l'ancienneté de la fonction de cadres au sein dudit panel ; alors de toutes façons que la classification des intéressés était nécessairement liée aux fonctions effectivement exercées et que prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 132-12 et L. 132-27 l'arrêt qui s'abstient de rechercher si les tâches effectivement exercées par M. Y correspondaient au groupe 5B ou 6B tels que définis par la classification de la convention collective applicable ;

2°/ qu'en se prononçant de la sorte, l'arrêt dénature en violation de l'article 1134 du code civil, le rapport de l'expert dont il est fait état et dont le tableau ne comporte aucune comparaison sélective des périodes antérieures ou postérieures à 1985 et dont les conclusions sont "M. Y arrive en troisième position sur sept dans l'ordre croissant des augmentations au mérite pour les cadres et en huitième position sur 12 par rapport aux douze salariés du panel" ;

3°/ que l'évaluation du salaire de base est nécessairement fonction du salaire d'embauche et que prive dès lors sa décision de toute base légale au regard des articles L. 122-45 et L. 412-2 du code du travail l'arrêt qui s'abstient de s'expliquer sur les données de l'expertise selon lesquelles "M. Y se classe en 3e position parmi les 12 salariés les mieux payés lors de leur entrée chez la société MSD ; il conserve cette même position parmi les 12 salariés les mieux payés au 1er avril 1999" ;alors qu'en déduisant un fait discriminatoire du seul fait d'un non alignement de l'évolution du salaire de base de M. Y sur celle des salaires d'autres salariés du panel, l'arrêt attaqué viole le principe de la prohibition de l'indexation du prix des services résultant de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier ;

Mais attendu, d'abord, que la comparaison de l'évolution des rémunérations de salariés dans une situation comparable ne contrevient pas à la prohibition de l'indexation du prix des services résultant de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier ;

Et attendu, ensuite, que la cour d'appel, recherchant dans le rapport d'expertise tous éléments de preuve de nature à établir sa conviction, sans être tenue de suivre l'expert dans ses conclusions, a relevé, sans dénaturation, qu'il ressortait des tableaux établis par l'expert que M. Y était, parmi les cadres retenus dans le panel, le seul à justifier d'une ancienneté aussi grande en qualité de contremaître et à ne pas être passé en catégorie 6B ; que depuis 1985, le montant des augmentations de salaire au mérite obtenues par le salarié était très inférieur à celui obtenu par tous les autres cadres ; qu'enfin le salarié était parmi ceux dont le salaire de base a le moins augmenté au cours de sa carrière et qu'il est le seul avec un autre salarié à n'avoir jamais obtenu de primes exceptionnelles ; qu'elle a ainsi caractérisé une différence de traitement avec les salariés se trouvant dans une situation comparable ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Laboratoires Merck Sharp Dohme Chibert aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à M. Y la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille huit.