Cass. civ. 1, 17-01-2008, n° 07-11.760, F-D, Cassation



CIV. 1

CH.B

COUR DE CASSATION

Audience publique du 17 janvier 2008

Cassation

M. BARGUE, président

Arrêt n° 51 F D

Pourvoi n° C

07-11.760

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par M. Pierre Z, domicilié Nice,

contre l'arrêt rendu le 3 octobre 2006 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (10e chambre), dans le litige l'opposant

1°/ à l'Établissement français du sang, (EFS) établissement public de l'Etat, dont le siège est Paris,

2°/ à la société GAN assurances IARD, société anonyme, dont le siège est Paris , défenderesses à la cassation ;

L'Établissement français du sang a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 décembre 2007, où étaient présents M. Bargue, président, M. Lafargue, conseiller référendaire rapporteur, M. Gridel, conseiller, Mme Collet, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Lafargue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. Z, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'Établissement français du sang, de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société GAN assurances IARD, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal formé par M. Z

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu que, victime d'une contamination par le virus de l'hépatite C de nature post-transfusionnelle à la suite d'une accident de la circulation, M. Z a recherché la responsabilité du Centre de transfusions sanguine des Alpes-Maritimes, assuré auprès du GAN au moment des faits, lequel a assigné l'EFS en intervention forcée ;

Attendu que, pour débouter M. Z de ses demandes d'indemnisation relatives à son préjudice spécifique de contamination, l'arrêt retient que l'état de santé de celui-ci n'a pas justifié, à ce jour, de traitement spécifique, lourd et invalidant ; qu'il ne s'est pas aggravé, et est au contraire stationnaire ; que s'il est avéré que sur le plan médical, il existe de multiples évolutions possibles de la maladie, le risque d'aggravation et d'évolution défavorable est incertain, les progrès constants de la recherche permettant d'augurer de la découverte de traitements adaptés et efficaces ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si M. Z n'éprouvait pas des craintes et des perturbations liées à cette contamination, de nature à caractériser un préjudice spécifique de contamination, et alors que ce préjudice peut être justifié par les souffrances morales éprouvées à la suite des traitements nécessaires et par les perturbations et craintes éprouvées toujours latentes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche et sur le moyen unique du pourvoi incident formé par l'EFS, pris en sa seconde branche

Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant dans les motifs de son arrêt, que, par jugement du 19 février 2004, le tribunal de grande instance de Nice avait décidé que la société GAN assurances devait sa garantie en l'absence de validité de la clause dite "de réclamation", tout en confirmant dans le dispositif de sa décision, ce jugement qui avait déclaré, à l'inverse, irrecevable l'action exercée par M. Z à l'encontre de cette société, aux motifs que cette clause était valable, la cour d'appel a méconnu les exigences du textes susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième branches du second moyen du pourvoi principal

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 octobre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne le GAN aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne le GAN à payer à M. Z la somme de 2 000 euros ; rejette la demande du GAN ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille huit.