SOC.PRUD'HOMMESL.G.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 30 mai 2007
Cassation partielle
Mme COLLOMP, président
Arrêt n° 1224 F D
Pourvoi n° U 05-42.863
Aide juridictionnelle partielle en défense au profit de M. Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 1er août 2005.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par l'association Joie de vivre, dont le siège est Habère Poche,
contre l'arrêt rendu le 24 mars 2005 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. Chrys Z, domicilié Bogève, défendeur à la cassation ;
M. Z a formé un pourvoi incident ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 mai 2007, où étaient présents Mme Collomp, président, Mme Martinel, conseiller référendaire rapporteur, MM. Trédez, Barthélemy, conseillers, M. Mathon, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Martinel, conseiller référendaire, les observations de Me Jacoupy, avocat de l'association Joie de vivre, de la SCP Gaschignard, avocat de M. Z, les conclusions de M. Mathon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Z a été engagé en qualité d'aide-cuisinier par l'association Joie de vivre selon un contrat à durée déterminée saisonnier à temps partiel à compter du 23 janvier 2001 jusqu'à la fin de la saison d'hiver ; qu'un second contrat à durée indéterminée daté du 26 décembre 2001 a été ensuite signé le 18 mai 2002 sur la base de 76 heures par mois "jusqu'à la fin de la saison d'été" ; que par une lettre du 13 juillet 2002, M. Z a informé son employeur de sa "décision de démissionner de son poste de cuisinier" ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et de dommages-intérêts pour rupture abusive ;
Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal de l'employeur
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié
Vu les articles L. 122-4, L. 122-13 et L. 122-14-3 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive, la cour d'appel a retenu que M. Z, qui s'était prêté pendant dix-huit mois à l'extension de ses horaires sans justifier d'aucune protestation ni réclamation, ne pouvait prétendre avoir été contraint, du fait de la pression qu'il invoquait sans la caractériser, à une démission claire et sans ambiguïté dans sa formulation écrite de sa main le 13 juillet et réitérée le 29 ;
Attendu cependant que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résultait de ses constatations qu'un différend opposait les parties au moment de la rupture relativement à des heures supplémentaires que l'employeur n'avait payées que partiellement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive, l'arrêt rendu le 24 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne l'association Joie de vivre aux dépens ;
Vu les articles 700 du nouveau code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, la condamne à payer à la SCP Gaschignard la somme de 2 500 euros et donne acte à cette dernière de ce qu'elle renonce à percevoir de l'Etat la contribution correspondant à la mission d'aide juridictionnelle ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille sept.