RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
LE VINGT ET UN DÉCEMBRE DEUX MILLE SIX,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire Code nac 63A
3ème chambre ARRÊT Isr 63 9
REPUTE
CONTRADICTOIRE
DU 21 DÉCEMBRE 2006 R.G. N' 05/06694 entre
Mademoiselle I. ...
ST CYR LES CHAMPAGNES
· .'stralf aes mInufes de greffe de la Cour d'Appel de Versailles
représentée par la SCP TUSET-CHOUTEAU, avoués - N° du dossier
20050387
plaidant par Me VERDIER, avocat au barreau d'ORLÉANS
APPELANTE et INTIMÉE
COPIE
AFFAIRE
1/ SA UCB PHARMA NANTERRE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
I. ...
SA UBC PHARMA
représentée par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoués - N° du dossier 05000798
plaidant par le cabinet BOPS, avocats au barreau de PARIS (P.555)
Décision déférée à la INTIMÉE et APPELANTE cour Jugement rendu le 10 Juin 2005 par le 2/ CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA Tribunal de Grande DORDOGNE
Instance de 50 rue C. B.
NANTERRE PERIGUEUX CEDEX N° Chambre I prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette N' Section B qualité audit siège
N° RG 5543/00
INTIMÉE DEFAILLANTE
Composition de la cour
En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Décembre 2006 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant
00E Mme WALLON, président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de
Madame Bemadette WALLON, président, Monsieur Marc REGIMBEAU, conseiller, Madame Marie-Claude CALOT, conseiller,
Greffier, lors des débats Madame Marie-Claire THEODOSE, Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le.;
à
-St P Cf- Wu rues
_SCPKEIM
eARei
I. ..., née le ..... à Douarnenez (29), a été exposée in utero au distilbène, médicament prescrit à sa mère pendant la grossesse et commercialisé par le laboratoire UCEPHA devenu UCB PHARMA.
En raison de saignements et de douleurs, I. ... a été examinée en août 1990 par le docteur ... ... ... qui s'est contenté d'un examen habituel.
En janvier 1991, alors qu'elle était âgée de 17 ans, un examen sous anesthésie générale a permis de diagnostiquer un adénocarcinome à cellules claires. Une chimiothérapie de réduction suivie d'une radiothérapie ont été mises en oeuvre dès février 1991 avec des hospitalisations régulières. Elle a présenté des troubles digestifs, des phénomènes de spasmes et de sub-occlusion qui ont nécessité des traitements. L'irradiation a entraîné un raccourcissement avec une rétractation de la filière génitale.
I. ... a subi deux autres interventions chirurgicales pour un hydrosalpinx, une première coelioscopie en novembre 2001 suivie d'une laparotomie en mars 2002.
L'évolution de la lésion tumorale a été favorable et avec dix ans de recul elle peut être considérée comme-guérie.
Considérant que l'adénocarcinome à cellules claires dont elle est atteinte est la conséquence directe de son exposition in utero au distilbène prescrit à sa mère, elle a saisi le tribunal de grande instance de Nanterre par acte du 11 mars 1993.
Par décision du 14 septembre 1994, cette juridiction, statuant avant dire droit, a ordonné une mesure d'expertise. Les experts ont déposé un pré-rapport en mai 1997 puis leur rapport définitif en février 1999.
I. ... a engagé une nouvelle instance à l'encontre de la société UCB PHARMA par assignation du 22 février 2000.
Par jugement du 24 mai 2002, le tribunal de grande instance de Nanterre a déclaré la société UCB PHARMA responsable du préjudice subi par I. ... et, avant dire droit sur la détermination du préjudice subi par la victime, a ordonné une mesure d'expertise confiée au professeur ... qui s'est adjoint un sapiteur en la personne du docteur ..., médecin gynécologue.
Statuant sur l'appel interjeté contre cette décision, la cour d'appel de Versailles, par arrêt du 30 avril 2004, a confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions. La société UCB PHARMA s'est pourvue en cassation. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi par arrêt du 7 mars .2006.
A la suite du dépôt du rapport d'expertise par le professeur ..., le 4 juillet 2003, l'instance relative à la liquidation du préjudice de I. ... s'est poursuivie.
Par jugement du 10 juin 2005; le tribunal de grande instance de Nanterre a - déclaré le jugement commun à la CPAM de la Dordogne
- condamné la société UCB PHARMA à payer à I. ..., la somme de 165.855,10 euros en réparation de ses préjudices corporels et personnels après déduction de la provision versée
-2-
- condamné la société UCB PHARMA à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
- ordonné l'exécution provisoire
- condamné la société UCB PHARMA aux dépens.
I. ... a interjeté appel de cette décision le 30 août 2005.
La société UCB PHARMA a interjeté appel de cette décision le 18 novembre 2005.
Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 9 décembre 2005.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 28 novembre 2006 auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé, I. ... demande à la cour de
- infirmer le jugement déféré
- statuant à nouveau
- condamner la société UCB PHARMA à leur payer à I. ... les sommes suivantes en réparation de son entier préjudice 1. ITT 7.700,00 euros
2. IPP 226.000,00 euros 3. préjudice de la douleur 20.000,00 euros
4. préjudice esthétique 4.500,00 euros 5. préjudice d'agrément 25.000,00 euros
6. Préjudice sexuel 40.000,00 euros 7. préjudice spécifique 185.000,00 euros
- condamner la société UCB PHARMA au paiement de la somme de 7.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile comprenant notamment les déplacements et
. l'assistance aux opérations d'expertise à Nantes
. _
- condamner la société UCB PHARMA aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP TUSET CHOUTEAU,, avoués, conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 30 novembre 2006 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, la société UCB PHARMA demande à la cour de
- Sur les préjudices économiqdes
- dire et juger que I. ... ne justifie d'aucune perte de revenus e que l'indemnisation forfaitaire ne saurait excéder 6.600 euros
- dire et juger que le taux de 45 % doit être retenu au titre de l'IPP et allouer de ce chef la somme de 105.750 euros compte tenu des montants habituellement accordés par la jurisprudence
- Sur les préjudices personnels
- vu l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985
- dire et juger que la notion de préjudice spécifique de contamination n'a pas lieu d'être transposée en l'espèce
- en conséquence
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué une indenmité au titre d'un préjudice spécifique
- dire et juger que l'évaluation des préjudices de I. ... devra se faire au regard des chefs de préjudice définis à l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985 soit
· le pretium doloris, évalué à 4,5/7 recouvrant tant les souffrances physiques que les souffrances psychiques ou morales, sera indemnisé par une somme qui ne saurait excéder 18.000 euros
· le préjudice esthétique évalué à 2,5/7 ne saurait excéder 3.500 euros
· le préjudice d'agrément recouvrant la perturbation dans la continuité des activités ludiques et sportives ne saurait excéder 12.000 euros le préjudice sexuel ne saurait excéder 30.000 euros
- constater que la CPAM de la Dordogne n'a pas constitué avoué.
La CPAM de la Dordogne régulièrement assignée par acte du 22 mars 12006 n'a pas constituée avoué mais a déclaré par courrier du 2 mai 2006 n'avoir aucune créance à faire valoir.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 novembre 2006.
MOTIFS
Il résulte du rapport des experts judiciaires, le professeur- kODAT et fe' docteur ..., dont les conclusions seront retenues par la cour dans la mesure où elles procèdent d'une analyse complète, claire et minutieuse et ne sont remises en cause par aucune pièce médicale contraire que
I. ..., exposée in utero au distilbène, âgée de 17 ans, a présenté. un adénocarcinome à cellules claires qui a été traité par chimiothérapie, irradiation et curiethérapie locale ; l'irradiation a entraîné un raccourcissement avec une rétractation de la filière génitale qui rf a pu être réduite par une plastie orificielle ;l'irradiation a provoqué de très nombreuses adhérences qui comportent un risque d'occlusion intestinale pouirant conduire à une hospitalisation pour intervention chirurgicale ; l'affection cancéreuse dont I. ... est atteinte peut être considérée comme guérie avec un recul de plus de 10 ans ; elle n'a pas de traitement hormonal substitutif mais est aménorrhéique depuis un peu plus d'un à la date du rapport d'expertise l'incapacité temporaire totale s'est étendue du 29 janvier 1991 au 31 août 1991
·
-
la consolidation a été acquise le 22 mai 2003 ; les soins chirurgicaux donnés en 2001 et 2002 ne sont pas en rapport direct et certain avec la lésion tumorale initiale l'incapacité permanente partielle est de 45 % lé pretium doloris est évalué à 4,5/7 le préjudice esthétique est évalué à 2,5/7
il existe un préjudice d'agrément ; la maladie ne lui a pas permis une insertion sociale satisfaisante
· sur le plan professionnel, elle a pu, avec beaucoup de courage, accéder à une formation mais elle est obligée de se réorienter, de faire un choix, pour se stabiliser.
Sur la base de ces conclusions et au vu des pièces produites aux débats, le préjudice subi par I. ... doit être indemnisé comme suit
1/ PRÉJUDICE SOUMIS A RECOURS
- au titre de PITT
I. ..., pendant la période d'incapacité temporaire totale de sept mois, n'a pas été en mesure de se livrer à ses activités habituelles et a du interrompre ses études à plusieurs reprises. Elle a subi un préjudice du fait de la perte des joies habituelles de la vie courante puisqu'elle a du être hospitalisée et suivre des traitements lourds.
Il convient de lui allouer de ce chef la somme de 7.000 euros. - au titre de L'IPP
Les experts ... et ... ont retenu un taux de 45 % alors que le premier collège expertal avait fixé le taux d'IPP à 55 % en 1996.
Toutefois, il convient de relever, comme l'a exactement fait le premier juge, que le premier collège expertal a inclus dans le taux d'IPP non seulement le pr-éjudice-fonctian- en-fais-- également le pretium doloris et le préjudice d'agrément, ne fixant un taux particulier que pour le préjudice esthétique qu'il évaluait alors à 2/7 alors que les experts désignés en 2004 ont retenu un taux de 2,5/7 pour ce préjudice.
Dès lors, en évaluant le taux de déficit fonctionnel séquellaire à45 %, les experts ... et ... ont bien pris en compte les séquelles résultant de l'adénocarcinome à cellules claires après avoir considéré que les hospitalisations en 2001 et 2002 ne sont pas en rapport certain 'et direct avec Io cancer. Ils ont, par principe, formulé des réserves sur une éventuelle récurrence tardive et ont souligné le risque d'état occlusif du fait des adhérences' digestives liées au traitement..
Il convient en conséquence de retenir le taux de 45 % pour évaluer le préjudice subi au titre du préjudice fonctionnel permanent.
Les experts ont relevé qu'il n'y a pas eu d'amputation d'organe mais que les conséquences sont telles sur l'utérus en particulier que toute perspective de grossesse est illusoire, que cette stérilité est la conséquence directe et certaine du traitement, que la patiente garde probablement des ovaires fonctionnels mais qu'elle est aménorrhéique depuis plus d'un an, que les traitements ont entraîné des remaniements anatomiques extrêmement importants avec un rétrécissement et une rétractation de la filière génitale rendant très difficile l'examen clinique et surtout ne permettant que des rapports sexuels douloureux et jamais satisfaisants, qu'il y a en plus des troubles digestifs avec des douleurs, des épisodes sub-occlusifs et des phénomènes spastiques.
I. ... souffre de douleurs abdominales et les crises douloureuses s'accompagnent de vomissements nécessitant la prise d'antispasmodiques et d'antiémétiques.
I. ... était scolarisée lorsque la diagnostic d'adénocarcinome a été posé. Elle a redoublé les classes de seconde, première et terminale. Elle a obtenu un CAP en ébénisterie. Elle a poursuivi sa formation avec beaucoup de difficultés du fait d'un absentéisme important et obtenu un brevet des métiers d'art. Le retentissement professionnel sera pris en compte dans l'évaluation de l'IPP.
Ce préjudice sera justement-indemnisé à hauteur de 135.000 euros à partir d'une valeur du point de 3.000 euros.
Le préjudice soumis à recours des organismes sociaux s'élève à la somme de 142.000 euros.
2/ PRÉJUDICE A CARACTÈRE PERSONNEL
- au titre du préjudice spécifique de contamination
Se fondant sur la jurisprudence relative à l'indemnisation des transfusés contaminés par le virus du SIDA ou de l'hépatite C qui a dégagé un nouveau concept de préjudice, le préjudice spécifique de contamination, I. ... sollicite l'indemnisation d'un préjudice spécifique d'exposition in utero au DES incluant les souffrances morales éprouvées à la suite des traitements nécessaires mais également l'angoisse d'une récidive qui n'est jamais exclue et les souffrances quotidiennes au plan affectif et moral.
Sans aucunement méconnaître la souffrance morale, quetidiennement resseritiè-T-- - de I. ... dont la vie est bouleversée depuis l'âge de 17 ans suite à l'exposition in utero au DES alors qu'elle pouvait tout naturellement, comme les autres jeunes femmes, espérer mener une existence harmonieuse et heureuse et avoir la joie de donner la vie, il n'apparaît pas que l'indemnisation de ce préjudice justifie le recours à la notion de préjudice spécifique.
En effet, le préjudice spécifique de contamination se définit comme le préjudice résultant pour une victime de la connaissance de sa contamination par un agent exogène, qu' il soit biblogique, physique ou chimique, qui comporte le risqué d'apparition à plus ou moins brève échéance d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital. C'est ainsi qu'il a été retenu par la jurisprudence notamment pour les victimes transfusées contaminées par le virus du SIDA. Il inclut, dès la phase de séropositivité, tous les troubles psychiques subis du fait de la contamination (réduction de l'espérance de vie, incertitude quant à l'avenir, crainte d'éventuelles souffrances physiques, et morales, isolement, perturbations de la vie familiale et sociale, préjudice sexuel et de procréation) mais également les différents préjudices, personnels apparus ou susceptibles d'apparaître comme les souffrances endurées, le préjudice esthétique et le préjudice d'agrément.
Le préjudice spécifique de contamination regroupe en réalité l'ensemble des préjudices d'ordre physiologique, psychologique et moral et permet d'indemniser l'entier préjudice des victimes qui sont menacées par une maladie grave mais dont les effets se développeront au terme d'une période dont la durée, qui peut être très longue, est au départ indéterminée.
Le préjudice spécifique de contamination tend à prendre en compte des dommages particuliers comme la réduction de l'espérance de vie avec les angoisses liées à une mort quasiment programmée, les perturbations affectives, familiales et sociales dans les conditions d'existence de la victime ainsi que le caractère essentiellement évolutif des dommages qui ne peuvent être indemnisés selon l'évaluation de droit commun qui suppose un dommage avéré et un état de consolidation.
Or en l'espèce, la maladie dont souffre I. ... est déclarée, les soins nécessaires ont été prodigués et l'affection cancéreuse est considérée comme guérie par les médecins qui ont pu fixer une date de consolidation.
Par ailleurs, tous les enfants exposés in utero au DES n'ont pas été atteints de maladie ou de malformations. Il n'existe donc pas un préjudice résultant du seul fait de -"l'exposition au DES. Les effets néfastes de ce médicament ne sont apparus que chez certaines personnes et sont très divers dans leurs manifestations de sorte qu'on ne peut retenir la notion générale d'exposition au distilbène pour justifier une indemnisation qui ne peut concerner que celles qui sont effectivement victimes de pathologies ou de malformations.
Les différents préjudices subis par I. ... peuvent être indemnisés selon les critères habituels en matière de réparation du préjudice corporel ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas puisqu'elle sollicite, outre la réparation de ce préjudice spécifique d'exposition in utero, celle des préjudices personnels couramment retenus.
En réalité sous le terme de préjudice spécifique d'exposition in utero, I. ... sollicite la réparation de son préjudice moral, lequel est incontestable et peut être indemnisé au titre du préjudice de la douleur.
- au titre du préjudice de la douleur physique et de la souffrance morale
Les experts ont fixé le pretium doloris à 4,5/7.
Au titre des douleurs physiques, il convient, selon les experts, de prendre en compte les explorations initiales, l'acte chirurgical, les séances de radiothérapie et de chimiothérapie, les manifestations douloureuses et les complications digestives et urinaires liées à la radiothérapie. Il convient d'y ajouter les douleurs ressenties à chaque rapport sexuel compte tenu du rétrécissement vaginal.
· A ces douleurs physiques s'ajoutent des souffrances morales qui sont la conséquence directe de l'exposition in utero'au DES. , En effet, à l'âge de 17 ans, I. ... a du subir une intervention chirûrgicale puis des traitements particulièrement pénibles . Elle a été contrainte d'accepter pendant plusieurs années des examens médicaux nombreux portant atteinte à son intimité qui ne sont pas imposés normalement à une jeune femme. Au lieu de vivre sa jeunesse avec insouciance et construire son existence sereinement, elle a du se battre contre une affection cancéreuse. Les difficultés importantes qu'elle a rencontré ont nécessité une prise en charge au plan psychologique avec mise en place d'un soutien psychothérapique. Son état dépressif l'aurait conduite à une tentative d'autolyse en 1998.
Encore actuellement, elle doit vivre avec un corps mutilé qui rend difficile toute vie sociale et affective. Elle vit avec beaucoup de souffrance l'impossibilité de donner la vie alors que sa soeur aînée a des enfants.
Ce préjudice sera indemnisé par l'octroi de la somme de 40.000 euros.
- au titre du préjudice esthétique
Les experts ont retenu un taux de 2,5/7 au titre du préjudice esthétique.
Ils ont relevé une cicatrice médiane sus pubienne et para-ombilicale de 15 centimètres, une cicatrice horizontale de 17 centimètres et une cicatrice latérale gauche de I centimètre. La paroi abdominale est peu dépressible ; elle apparaît blindée, cartonnée ce qui est la conséquence de la radiothérapie et des phénomènes d'adhérences.
Ce préjudice sera indemnisé par la somme de 4.500 euros sollicitée. - au titre du préjudice d'agrément
Le préjudice d'agrément est le préjudice subjectif de caractère personnel résultant des troubles ressentis dans les conditions d'existence. Il se rapporte à la diminution de tous les agréments de la vie et doit indemniser l'ensemble des troubles dans les actes essentiels de la vie courante, dans les activités affectives et familiales, dans les activités de loisirs.
I. ... a confirmé aux experts qu'elle a arrêté les activités sportives, en particulier l'équitation, devenue insupportable du fait des douleurs abdominales provoquées. Ses conditions d'existence sont rendues difficiles et elle a résumé ainsi sa détresse "dans ma vie sociale, j'ai tout raté".
Ce préjudice sera indemnisé à hauteur de 15.000 euros.
- au titre du préjudice sexuel et de procréation
I. ... présente un état de stérilité.
Physiquement, les experts ont relevé que les traitements ont entraîné des remaniements anatomiques extrêmeMent importants avec une rétractation de la filière génitale et une étroitesse vaginale, que les rapports sexuels sont possibles mais toujours très douloureux et jamdis satisfaisants.
S'agissant d'unè très jeune femme, ce préjudice sera indemnisé à hauteurde 40.000 euros.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort, Infirme le jugement déféré sur le quantum des sommes allouées à I. ..., Statuant à nouveau, Fixe l'indemnité due à I. ... comme suit
1) Préjudice soumis à recours
- ITT (troubles dans la vie courante) 7.000,00 euros
- IPP 45 % 135.000,00 euros
- Total 142.000,00 euros
2) Préjudice personnel
- préjudice de la douleur physique et de la souffrance morale 40.000,00 euros
- préjudice d'agrément 15.000,00 euros
- préjudice esthétique 4.500,00 euros
- préjudice sexuel 40.000,00 euros
- total 99.500,00 euros
Dit n'y avoir lieu à fixation d'un préjudice spécifique d'exposition in utero au DES,
Condamne la société UCB PHARMA à payer à I. ... la somme de 241.500 euros en réparation de son préjudice corporel et dit que de cette somme sera déduit le montant de la provision déjà versée soit 15.244,90 euros,
Condamne la société UCB PHARMA à payer à I. ... la somme de 7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne la société UCB PHARMA aux dépens de première instance et d'appel, incluant les frais d'expertise avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP TUSET CHOUTEAU, avoués, conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
signé par Madame B. ..., président et par Madame ..., greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.