CIV. 1 C.F
COUR DE CASSATION
Audience publique du 5 décembre 2006
Cassation partielle
M. BARGUE, conseiller doyen, faisant fonctions de président
Arrêt n° 1740 F D
Pourvoi n° J 04-16.515
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Robert Z, domicilié Strasbourg,
contre l'arrêt rendu le 2 avril 2004 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section B), dans le litige l'opposant
1°/ à M. Camille Y,
2°/ à Mme Marinette YX, épouse YX,
domiciliés Obermorschwiller, agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure, Laura Jacob,
3°/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Mulhouse, dont le siège est Robert Mulhouse , défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 2006, où étaient présents M. Bargue, conseiller doyen, faisant fonctions de président, Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire rapporteur, M. Gridel, conseiller, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire, les observations de Me Foussard, avocat de M. V, de la SCP Tiffreau, avocat des époux Y, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le second moyen
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que le 24 août 1994, Laura Jacob, alors âgée de 2 ans, a été opérée d'un strabisme par M. V, médecin ophtalmologiste ; qu'à la suite de l'intervention, elle a subi un décollement rétinien et perdu la vision d'un oeil ; que les époux Y, agissant en qualité de représentants légaux de l'enfant, ont recherché la responsabilité du praticien ; que l'arrêt attaqué a notamment retenu à l'encontre de M. V un défaut d'information relatif aux risques afférents à l'intervention et un recours précipité à cette intervention ;
Attendu que pour condamner M. V à réparer l'entier préjudice et non la perte de chance subie par l'enfant, la cour d'appel relève que l'origine de la perte de l'oeil était liée à l'atrophie post-opératoire de l'oeil, la cause pouvant être soit une inflammation, soit une perforation méconnue au cours de l'intervention du globe ; que dans le cas de l'enfant, la seule hypothèse permettant d'expliquer la perte de l'oeil était celle d'une perforation sclérale passée inaperçue et que par son défaut d'information, sa précipitation à l'intervention chirurgicale et l'utilisation de fils de soie, M. V avait commis une faute ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser le lien de causalité entre la perforation sclérale ayant entraîné la perte de l'oeil et une faute retenue à l'encontre du praticien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il ait lieu de statuer sur le premier moyen
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. V à indemniser les conséquences dommageables de l'intervention, l'arrêt rendu le 2 avril 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne les époux Y aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille six.