CA Paris, 18e, E, 20-10-2006, n° 06/06992



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

· 2nce re'e

-.1.o foc

elve,

(ttimQbe.4

COUR D'APPEL DE PARIS 18ème Chambre E

ARRÊT DU 20 Octobre 2006 AVANT DIRE DROIT AU FOND (n° At4, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général S 06/06992

Décision déférée à la Cour jugement rendu le 28 Avril 2006 par le conseil de prud'hommes de Longjumeau section Activités diverses RG n° 06/00316

APPELANT

Monsieur Z Z Z Z Z Z Z Z Z Z Z ZZEVRYEVRY


EVRY

INTIMÉS

Mademoiselle Linda Y Y

Résidence du Petit Bois


CARRIERES SUR SEINE comparant en personne, assistée de Me Daniel RAYEZ, avocat au barreau de PARIS, toque

B.1024

Monsieur Philippe W 2 passage Roche


VERSAILLES CEDEX

représenté par Me Francis LEGOND, avocat au barreau de VERSAILLES, toque C 118

PARTIES INTERVENANTES

CONFEDERATION GÉNÉRALE DU TRAVAIL (FO) 263 rue de Paris
MONTREUIL

représenté par Me Gilbert FILIOR avocat au barreau de Paris, toque R 105 CONFEDERATION GÉNÉRALE DU TRAVAIL (CGT)


PARIS

représenté par Me Michel HENRY, avocat au barreau de Paris, toque P99





UNION LOCALE CGT DE CHATOU


CHATOU
représentée par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque B.1024

CONFEDERATION FRANÇAISE DEMOCRATIQUE DU TRAVAIL (CFDT)


PARIS
représenté par Me Pascale LEGENDRE, avocat au barreau de Paris


PARIS

représenté par Me Bruno de PREMARE, avocat barreau de Paris, Toque C1176

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Septembre 2006, en audience publique, devant la Cour composée de

Monsieur Jean-Louis VERPEAUX, Président

Madame Marie-José THEVENOT, Conseillère

Madame Martine CANTAT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier Madame Nicole GUSTAVE, lors des débats

MINTISTERE PUBLIC

L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur J. ..., qui a pris la parole à l'audience pour présenter ses obseravtions.

ARRÊT

- contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Jean-Louis VERPEAUX, Président

- signé par Monsieur Jean-Louis VERPEAUX, Président et par Madame Evelyne MUDRY, greffier présent lors du prononcé.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mademoiselle Linda Y Y a été engagée en qualité de secrétaire le 1er juillet 2005 par Monsieur Philippe W mandataire judiciaire suivant un contrat à durée déterminée, motivé par une "surcharge temporaire de travail" et prévu pour une durée " 6 mois renouvelable par tacite reconduction"; ce contrat mentionnait une période d'essai d'un mois renouvelable une fois.

Cour d'Appel de Paris ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006 18 ème Chambre, section E RG n'06/06992 - 2ème page

Le 6 décembre 2005, avant l'échéance dudit contrat, les parties signaient, pour le même emploi, un contrat "nouvelles embauches" tel qu'il a été créé par l'ordonnance du 2 août 2005.

Par lettre du 27 janvier 2006, l'employeur mettait fin à ce contrat, avec un préavis de un mois.

Contestant les conditions de cette rupture, Mademoiselle Linda Y Y saisissait, le 20 mars 2006, le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU qui, par jugement rendu le 28 avril 2006 a dit que l'ordonnance du 2 août 2005 instituant le contrat nouvelles embauches est contraire à la convention 158 de l'Organisation Internationale du Travail du 22 juin 1982 et a requalifié les deux contrats en cause en contrat à durée indéterminée.

En conséquence, Monsieur Philippe W a été condamné à verser à Melle Linda Y Y les sommes suivantes

-10 000 euros à titre de dommages intérêts pour rupture abusive, -2 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure irrégulière,

-1 400 euros à titre d'indemnité de requalification, -1 000 euros à titre de dommages intérêts pour défaut de visite médicale,

-840 euros à titre d'indemnité de précarité pour la période du ?Juillet au 31 décembre 2005, -150 euros à titre de dommages intérêts pour conclusion abusive d'un contrat prétendu,

"nouvelles embauches" sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil.

-1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a en outre ordonné la remise sous astreinte d'une attestation ASSEDIC conforme à sa décision.

Cette décision, assortie de l'exécution provisoire pour le tout, a été frappée d'appel par le procureur de la République d'Evry le 3 mai 2006 ainsi que par M.WPhilippe W.

Par mémoire régulièrement déposé le 19 juillet 2006, le préfet de l'Essonne a décliné la compétence du juge de l'ordre judiciaire pour connaître de l'exception concernant l'illégalité de l'ordonnance du 2 août 2005, acte administratif réglementaire, qui doit être soumise à. la seule compétence du juge administratif .

Monsieur Philippe W conclut à l'infirmation du jugement déféré, demande que Mademoiselle Linda Y Y soit déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée à restituer les sommes versées en exécution provisoire du jugement ainsi qu'au versement d'une somme del 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

Le Ministère Public représenté par le procureur général près la cour d' appel conclut au rejet du déclinatoire de compétence et subsidiairement soutient qu'il est sans objet .

Mademoiselle Linda Y Y ainsi que l'Union locale CGT de CHATOU, qui intervient volontairement au litige en cause d'appel, demandent sur la base d'un salaire mensuel de 1 568,89 euros brut, que l'indemnité de précarité soit majorée de 21,52 euros et l'indemnité de fin de CNE, majorée de 3,75 euros;

Mademoiselle Linda Y Y demande également

-261,87 euros à titre de majoration des heures supplémentaires à 25 %, -26,18 euros à titre de congés payés afférents,

-5 000 euros à titre d'indemnité de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminé,

-3 000 euros à titre d'indemnité pour défaut d'examen médical d'embauche, -5 000 euros à titre de dommages intérêts pour conclusion abusive d'un CNE, -15 000 euros à titre de dommages intérêts pour rupture abusive,

Cour d'Appel de Paris

18 ème Chambre, section E



ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006

RG n*06/06992 - 3ème page




866,71 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, -1 000 euros à titre de dommages intérêts pour défaut d'information du salarié du droit à la

formation,

-1 000 euros à titre à titre d'indemnité pour période d'essai illégale, -2 000 euros sur le fondement de /'l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile, Mademoiselle Linda Y Y demande, pour le surplus la confirmation du jugement dans ses autres dispositions .

L'union locale demande la condamnation de M.WPhilippe W à lui verser les sommes suivantes

-5 000 euros à titre de dommages intérêts, -1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

Quatre organisations professionnelles interviennent volontairement au litige en cause d'appel - - La Confédération Française des Travailleurs Chrétiens (CFTC) soutient que le déclinatoire du Préfet de l'Essonne est sans objet, l'ordonnance du 2 août 2005 ayant fait l'objet d'une ratification implicite de sorte que l'ordonnance précitée a acquis valeur législative.

La Confédération Générale du Travail Force Ouvrière (F.0) fait valoir que le préfet de l'Essonne a porté directement son déclinatoire devant la cour alors qu'il aurait dû en saisir le procureur général de sorte que sa demande n'est pas recevable.

Ce syndicat soutient également que l'ordonnance a fait l'objet d'une ratification implicite; subsidiairement, il conclut au rejet du déclinatoire au motif que la Convention Internationale du Travail n° 158 est d'application directe devant les juridictions nationales qui doivent appliquer la nonne la plus favorable au salarié .

La Confédération Générale du Travail (C.G.T.) conclut au rejet du déclinatoire en soutenant que le juge judiciaire doit appliquer le principe de conventionnalité aux actes administratifs réglementaires qui viennent en concurrence avec une norme internationale directement applicable en droit interne et que la question n'a pas à être soumise au juge administratif.

La Confédération Française Démocratique duTravail (C.F.D.T.) soutient que le déclinatoire est sans objet en raison de la ratification implicite de l'ordonnance du 2 août 2005; la CFDT indique d'autre part que la solution du litige ne suppose pas un contrôle préalable de légalité de l'acte administratif, l'office d juge judiciaire étant de faire prévaloir la nonne la plus favorable Les moyens oralement présentés au soutien de ces prétentions sont ceux que les parties ont énoncés dans les écritures, communiquées entre elles, déposées à l'audience et auxquelles il y a lieu de se référer pour plus ample exposé .

Ceci étant exposé, la Cour,

L'appel a donné lieu à l'ouverture de deux dossiers. Il existe entre les litiges un lien tel qu'il est d'une bonne justice de les juger ensemble. Il convient donc d'ordonner la jonction entre les instances n° 06/06992 et 06/06993.

Considérant qu'en application de l'article L. 411-11 du Code du travail, l'intervention volontaire en cause d'appel des syndicats professionnels visés ci-dessus,est recevable .

Sur la recevabilité du déclinatoire de compétence
Considérant que le syndicat F.O. fait valoir que le préfet de l'Essonne s'est directement adressé, le 18 juillet 2006 à la cour d'appel pour décliner la compétence du juge judiciaire

Cour d'Appel de Paris

18 ème Chambre, section E

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006 RG n*06/06992 - 4ème page



alors qu'en application de l'article 6 de l'ordonnance du 1' juin 1828, il devait adresser son déclinatoire au procureur de la République;

Considérant que cette analyse repose sur une appréciation inexacte des faits de la cause; qu'il apparaît en effet que le préfet de l'Essonne a adressé son déclinatoire de compétence au procureur général près la cour d'appel de Paris qui l'a reçu le 19 juillet 2006 ainsi qu'il en est justifié par le tampon-dateur apposé sur le document;

Que le procureur général a alors, en application de l'article 6 de l'ordonnance précitée, fait connaître à la cour la demande formée par le préfet et a requis par conclusions reprises à l'audience, sur le bien fondé de cette demande;

Que la formule utilisée par le préfet pour "demander à la cour d' appel de Paris... de décliner la compétence du juge judiciaire "ne doit pas s'entendre d'une saisine directe de la cour, mais seulement de la formulation de sa demande concernant une affaire dont la cour est saisie et dont il souhaite le dessaisissement;

Considérant d'autre part, que le même syndicat soutient que le préfet ne pouvait pas porter directement son déclinatoire en cause d'appel;

Que cependant suivant les dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828, le préfet peut saisir la juridiction d'appel d'un déclinatoire de compétence dans les conditions prévues par l'article 6 de ladite ordonnance; que l'interdiction faite au préfet par l'article 4 d'élever le conflit après que la question de la compétence ait été définitivement tranchée, n'est pas applicable en l'espèce;

Qu'il convient en conséquence de dire recevable le déclinatoire de compétence en cause; Sur le bien-fondé du déclinatoire de compétence

Considérant qu'en application des articles let 8 de l'ordonnance du 1' juin 1828, le juge saisi a l'obligation de statuer sur le déclinatoire de compétence avant tout débat au fond et de se prononcer sur les conclusions d'incompétence contenues dans le déclinatoire;

Considérant que l'article 55 de la Constitution de 1958 fonde la primauté, dans l'ordre interne français, des traités internationaux sur les normes nationales, de sorte que, en cas de conflits de normes, les dispositions de toute convention internationale l'emportent sur la loi française;

Considérant que c'est par application de ce principe de la hiérarchie des normes, réaffirmé par un arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de Cassation en date du 14 octobre 1997, que les premiers juges ont dit que l'ordonnance du 2 août 2005, instituant les contrats nouvelles embauches, ne pouvait recevoir application dans le litige qui leur était soumis, en raison de sa non-compatibilité avec la Convention 158 de L'OIT en date du 22 juin 1982;

Considérant que par son déclinatoire de compétence du 18 juillet 2006, le Préfet de l'Essonne invite la cour à ne pas donner réponse à cette question mais de la soumettre, de façon préjudicielle, à l'appréciation du juge administratif;

Que pour priver le juge du contrat de travail de la plénitude de sa juridiction, le Préfet invoque le principe de séparation des autorités admini stratives et judiciaires qui trouve son fondement dans la loi des 16-24 août 1790 et auquel le Tribunal des Conflits a donné sa consécration jurisprudentielle, non démentie depuis, le 16 juin 1923 (arrêt Septfonds );

Considérant que la convention n° 158 adoptée à Genève le 22 juin 1982 a été ratifiée par la France le 30 décembre 1988 (loi 88-1242 du 30 décembre 1988); qu'elle a été publiée par décret 90-140 du 9 février 1990, et est entrée en vigueur le 16 mars 1990; qu'elle

Cour d'Appel de Paris

18 ème Chambre, section E



ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006 RG n'06/06992 - Sème page



concerne la cessation de la relation de travail à l'initiative de l'employeur;

Considérant que la question de l'applicabilité directe en France de cette norme internationale n'est pas soulevée dans la présente instance; qu'en effet par un arrêt du 19 octobre 2005, le Conseil d'Etat a admis cette applicabilité ainsi que la Cour de Cassation, par un arrêt du 29 mars 2006;

Considérant d'autre part que, par application de la loi du 26 juillet 2005, le Gouvernement a, par ordonnance du 2 août 2005, créé un contrat de travail "nouvelles embauches" ouvert à certaines catégories d'employeurs et a défini les conditions dans lesquelles ce contrat à durée indéterminé peut être rompu, de façon dérogatoire au droit commun, durant les deux premières années;

Qu'à bon droit, le Préfet de l'Essonne fait valoir que jusqu'à sa ratification par la loi, une ordonnance prise sur le fondement de l'article 38 de la Constitution ale caractère d'un acte administratif et soutient que la question de sa légalité relève de la compétence de la juridiction administrative, au besoin sous la forme d'une question préjudicielle lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire est saisie d'un litige nécessitant l'appréciation de cette légalité;

Considérant, en l'espèce, que trois parties à l'instance (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens, Confédération Générale du Travail Force Ouvrière et Confédération Française Démocratique du Travail) font valoir que ladite ordonnance a fait l'objet d'une ratification implicite, qu'elle a acquis force législative et qu'elle échappe ainsi qu contrôle du juge administratif;

Qu'en l'espèce la ratification implicite de l'ordonnance résulterait de trois lois postérieures qui en ont repris les éléments essentiels

-Loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances dont l'article 8 définit les conditions d'attribution de l'allocation forfaitaire aux travailleurs involontairement privés d'emploi et qui précise notamment que les délais pour en faire la demande "sont ceux applicables aux contrats nouvelles embauches"; qu'il importe peu que cette loi ait été postérieurement abrogée, dès lors que sa promulgation a ouvert des droits;

-Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finance pour 2006 dont l'article 161-3 donne une base budgétaire à la précédente mesure ;

-Loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux dont l'article 3 confie au fonds de solidarité le soin de collecter l'allocation forfaitaire prévue par l'ordonnance du 2 août 2005;

Considérant que si la ratification des ordonnances prises en application de l'article 38 de la Constitution est faite par le vote d'une loi de ratification explicite, il est admis que la ratification puisse être implicite ou indirecte; qu'ainsi le Conseil Constitutionnel précise que la ratification peut résulter d'une loi "qui sans avoir cette ratification pour objet direct, l'implique nécessairement" (C.C. 23 janvier 1987 . Conseil de la concurrence)

Considérant que les lois invoquées ne satisfont pas à cette exigence; que la loi du 31 mars 2006 fixe un délai par référence à l'ordonnance du 2 août 2005 sans que cette fixation implique nécessairement la volonté de ratifier ladite ordonnance dans ses dispositions essentielles;

Que de même le fonds de solidarité issu de la loi du 23 mars 2006 a pour mission de collecter d'autres financements que celui prévu par l'ordonnance du 2 août 2005 de sorte que le Parlement n'a pas expressément manifesté sa volonté de la ratifier en l'incluant dans une énumération;

Cour d'Appel de Paris ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006 18 ème Chambre, section E RG n'06/06992 6ème page

Qu'enfin une loi de finance dont l'objet est limité à des considérations budgétaires ne peut faire office de loi de ratification même implicite;

Qu'il convient en conséquence de répondre à la demande de dessaisissement présentée par le Préfet de l'Essonne;

Considérant que pour contester au juge judiciaire le pouvoir d'exercer son contrôle de conventionnalité d'un acte administratif, il est soutenu, d'une part que l'exigence de primauté du droit international sur les normes nationales est respectée par le renvoi au juge administratif;

Considérant que sur ce point, il importe peu en effet que le juge chargé de se prononcer sur la conventionnalité soit de l'ordre judiciaire ou administratif dès lors qu'il respecte dans son appréciation le principe de primauté;

Qu'il est également soutenu que l'examen de la conventionnalité d'un acte réglementaire implique nécessairement le contrôle de sa légalité puisque le principe de primauté a précisément pour objet de faire triompher une norme internationale directement applicable sur un droit interne qui ne lui est pas compatible; qu'en définitive, pour le Préfet de l'Essonne, le juge judiciaire qui statue sur l'exception d'illégalité d'un acte administratif, porte atteinte au principe de séparation;

Considérant que le principe de séparation des pouvoirs a une valeur constitutionnelle ainsi que l' a déclaré le Conseil Constitutionnel dans sa décision du 23 janvier 1987 (arrêt Conseil de la concurrence) et qu'il en précise la portée en indiquant que les décisions prises, dans l'exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, relèvent, à l' exception du domaine réservé à l'autorité judiciaire, de la compétence de la juridiction administrative, mais seulement lorsqu'il est demandé l'annulation ou la réformation de telles décisions;

Qu'en l'espèce, les demandes présentées devant le juge du contrat de travail tendent à faire constater l'inapplicabilité de l'ordonnance du 2 août 2005 au litige qui lui est soumis;

Qu'ainsi d'une part l'examen de l'ordonnance précitée au regard de sa compatibilité est nécessaire au règlement du litige dès lors que les parties ont entendu mettre cette question dans le débat et qu'il est demandé la réformation d'un jugement qui a dit l'ordonnance du 2 août 2005 inapplicable en droit français;

Que d'autre part, le contrôle de conventionnalité opéré par le juge judiciaire est distinct d'un contrôle de légalité qui devrait être soumis au juge administratif;

Qu'en effet l'objet de ce contrôle n'est pas de tendre à l'annulation ou à la réformation de l'acte administratif en cause mais seulement de dire s'il convient d'en faire application au litige soumis au juge du contrat de travail si ce dernier ne l'estime pas compatible avec une norme supérieure; que ce contrôle de conventionnalité ressort des attributions du juge judiciaire qui méconnaîtrait l'étendue de ses pouvoirs s'il abandonnait à l'ordre administratif l'appréciation de cette compatibilité;

Que ce contrôle, qui a pour seul effet d'écarter l'application d'une norme, n'implique pas nécessairement un contrôle de légalité de cette norme dont les effets tendent au contraire à son annulation;

Que la séparation des pouvoirs interdit au juge judiciaire d'exercer sa censure sur les actes de l'Exécutif mais ne lui interdit pas d'en vérifier la compatibilité avec des conventions internationales qu'il a l'obligation d'appliquer étant directement applicables en droit interne;

Cour d'Appel de Paris ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2006 18 ème Chambre, section E RG n'06/06992 - 7ème page

Qu'en conséquence, la question de la compatibilité de l'ordonnance du 2 axitit 2005 avec la convention n°158 de l'OIT ne constitue pas une question préjudicielle qui doit être soumis préalablement à l'examen du juge administratif mais relève de 1' office du juge du fond ;

Qu'il convient, dans ces conditions, de rejeter le déclinatoire de compétence du Préfet de l'Essonne;

Considérant qu' en application de art. 8 de V ordonnance du let juin 1828,le préfet pourra élever le conflit dans la quinzaine de réception pour tout délai, s'il. estime qu'il y alleu,

Qu'en conséquence, il convient de surseoir, jusqu'à l' expiration dudit délai, à statuer sur le fond du litige avant d'inviter, éventuellement les parties à s'en expliquer

contradictoirement ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ordonne la jonction entre les numéros. RO 06/06992 et 06146993;

Avant dire droit au fond,

Rejette le déclinatoire de compétence déposé par le préfet clel'Essonnele 19 *3illet1406.,

Sursoit à statuer au fond jusqu' à. l' expiration du délai ouvert au rdetvout tlevelle colin Réserve les dépens .

LE GREFFIER