CA Paris, 21e, C, 25-04-2006, n° 04/34700



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS 21ème Chambre C

ARRÊT DU 25 Avril 2006 (n°,(, f pages)

Numéro d'inscription au répertoire général S 04/34700

Décision déférée à la Cour jugement rendu le 24 Février 2004 par le conseil de prud'hommes de PARIS section commerce RG n° 01/14698

APPELANTE

1° - SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LIMITED


PARIS

représentée par Me Elisabeth LAHERRE, avocat au barreau de PARIS, toque P 53,

INTIMÉE

2° - Madame Rosario Y Y


MONTREUIL SOUS BOIS comparant en personne, assistée de Me Gilbert FILIOR, avocat au barreau de PARIS,

toque R 105,

PARTIE INTERVENANTE

30 - ASSEDIC DE L'EST FRANCILIEN

Unité d'appui Bagnolet

59/65, rue V. H.
BAGNOLET CEDEX, représenté par Me Véronique DAGONET, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque PC003,

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Mars 2006, en audience publique, devant la Cour composée de

Monsieur Jean-Pierre ROBERT, Président

Madame Irène LEBE, Conseiller

Madame Marie-Christine DEGRANDI, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, lors des débats, ARRÊT

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement et signé par Monsieur Jean-Pierre ROBERT, président

et par Mme Anne-Marie CHEVTZOFF, greffier présent lors du prononcé.

Statuant sur l'appel régulièrement interjeté par la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD du jugement de départage du 24 février 2004, auquel il est renvoyé pour l'exposé des éléments du litige à cette date, par lequel le Conseil de Prud'hommes de PARIS, section commerce, chambre 5, a

q requalifié en contrat à durée indéterminée la relation de travail intervenue entre Mme Y Y et la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à compter de mars 1996 ;

q condamné la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à lui régler une somme de

- 1.629 Euros à titre d'indemnité de requalification sur le fondement de l' article L.122-3-8 du Code du Travail avec intérêts à compter du jugement,

q condamné la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à lui régler

- le rappel de salaire calculé sur la base du taux horaire comme précisé dans l'exposé des motifs de la présente décision,

- la majoration de 25% des heures supplémentaires identifiées dans l'exposé des motifs, outre les congés payés afférents, les repos compensateurs et les congés payés sur les repos compensateurs,

- l'indemnité de 13"ne mois à compter de 1997 sur la base du salaire de décembre reconstitué,

- une somme de 404,19 Euros brut au titre de la prime d'ancienneté due à compter de 1998, avec exécution provisoire de droit, qa rejeté la demande relative aux jours fériés et au 1" mai,

qa renvoyé les parties à faire les comptes entre elles sur la base des normes fixées dans la présente décision,

q dit que les sommes que la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED est condamnée à payer porteront intérêt au taux légal à compter du 22 novembre 2001, qa condamné la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à régler à Mme Y Y une indemnité de préavis à hauteur de 2 mois de salaire et les congés payés afférents, et une indemnité de licenciement conforme à la convention collective, qa condamné d'ores et déjà la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à lui régler une somme provisionnelle de 3.000 Euros au t du préavis et de 3.500 Euros au titre de l'indemnité de licenciement, avec intérêts à compter du 27 novembre 2001, qa condamné la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à lui régler une somme de

- 9.780 Euros sur le fondement de l'article L.122-14-4 du Code du Travail, avec intérêts à compter du jugement et exécution provisoire à hauteur des 2/3 de cette somme sur le fondement de l'article 515 du Nouveau Code de Procédure Civile,

qa ordonné à la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED de rembourser à l'ASSEDIC les indemnités versées à Mme Y Y depuis son licenciement et ce dans la limite de 6 mois d'indemnités,

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21ème Chambre, section C

RG n° 04/34700 - 2ème page qa ordonné la remise à Mme Y Y par la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED des documents conformes au présent jugement et la régularisation de la situation de l'intéressée auprès des organismes sociaux, qa condamné la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à régler à Mme Y Y une somme de

1.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

q enfin a rejeté toute demande plus ample des parties.

L'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et ainsi de débouter Mme Y Y de l'ensemble de ses demandes, et de le condamner à lui payer la somme de 2.000 Euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

L'intimée relève appel incident et prie la cour de - de confirmer le jugement entrepris,

- y ajoutant de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour qu'il soit statué, à défaut d'accord entre les parties, sur les comptes correspondant à ses différents chefs de créance,

- subsidiairement, condamner la Société RITZ HÔTEL LIMITED à lui payer la somme de 25.000 Euros en réparation de son préjudice né du refus de la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED d'établir entre les parties un contrat de travail à durée indéterminée,

- dans tous les cas, dire la Société RITZ HÔTEL LIMITED mal fondée en ses différents moyens, demandes fins et conclusions et l'en débouter,

- condamner la Société THE RITZ HÔTEL LIMITED à lui payer la somme de 2.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ASSEDIC de L'EST FRANCILIEN sollicite de la cour de

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il qualifie le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, En conséquence,

- condamner la société à lui verser la somme de 6.400,68 Euros en remboursement des allocations chômage versées au salarié,

- condamner la société à lui verser la somme de 500 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

CECI ÉTANT EXPOSÉ

Considérant que Mme Y Y a été engagée par la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD, à compter du 14 mars 1996 suivant contrat à durée déterminée d'extra, en qualité de femme de chambre ; que divers autres contrats à durée déterminée ou contrats saisonniers devaient ensuite être conclus entre les parties ;

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Qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de ses contrats en contrat à durée indéterminée, avec ses conséquences, et d'une demande de rappel de salaire et autres primes, enfin de demandes d'indemnisation de la rupture qu'elle estime être intervenue en août 2001, dès lors qu'il ne lui était plus demandé de vacations ;

Que la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD a par lettre du 14 août 2001, décidé de mettre fin auxdites vacations en ces termes

"Lors de votre entretien du mardi 03 août 2001 avec Mademoiselle ... et Mademoiselle ..., nous avons évoqué les vacations que vous étiez en mesure d'effectuer au service 'femmes de chambre" de notre entreprise, et avons émis des réserves sur votre ponctualité et la qualité des services que vous nous rendez.

Au cours de cet entretien vous avez avancé une grande détresse financière, pour que nous vous donnions néanmoins le maximum de vacations possibles et avez assuré en contrepartie que vous feriez les efforts demandés.

Le lundi 6 août, conformément à vos souhaits et par indulgence, nous vous avons donc proposé 3 vacations pour les mercredi 8 août, jeudi 9 août et vendredi 10 août 2001. Vous avez refusé les vacations des 8 et 9 août 201. Le lundi 14 août nous vous proposions à nouveau trois vacations pour les 18, 21 et 22 août 2001. Vous avez refusé l'ensemble de ces vacations.

Votre détresse financière serait donc moins alarmante que ce que vous nous avez exposé, et nous décidons donc d'appliquer la mesure initialement prévue, à savoir l'arrêt de vos vacations puisque nous ne pouvons pas êtes assuré de votre disponibilité".

SUR QUOI, LA COUR,

SUR LA REQUALIFICATION DU CONTRAT

Considérant qu'à l'appui du rejet de la demande de requalification du contrat, la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD soutient que Mme Y Y a été employéesous contrats d'extra et sous contrats saisonniers, lesquels sont réguliers, dès lors qu'ils répondaient aux motifs de recours légaux, en particulier des contrats dits d'usage ; qu'en effet, il est d'usage dans le secteur de l'hôtellerie restauration de recourir aux contrats d'extra ; que la démonstration de l'usage implique, au dernier état de la jurisprudence, la démonstration du caractère temporaire de l'emploi ; que cette condition est remplie en l'espèce ; que les contrats d'usage conclus avec Mme Y Y, et les contrats saisonniers, les uns et les autres correspondant à un motif de recours différent, sont prévus par la convention collective ; que Mme Y Y n'a pas été embauchée, sous contrat saisonnier, sans discontinuité, mais au contraire, sur des périodes allant de mai à octobre, savoir pendant les pics d'activité constituant la saison ; que les dispositions conventionnelles ont été respectées dès lors que lesdits contrats saisonniers n'ont jamais dépassé le plafond de neuf mois, peu important que l'hôtel soit ouvert toute l'année ;

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Mais considérant que comme le fait valoir, à juste titre Mme Y Y, et alors qu'il y a lieu de distinguer, comme le souligne elle-même la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD, entre contrats d'extra et contrats saisonniers, il résulte de ses bulletins de salaires que celle-ci a été embauchée en premier lieu, le 14 mars 1996, suivant un contrat à durée déterminée d'extra, au motif d'un surcroît d'activité ; que selon lesdits bulletins de salaires, ce contrat s'est poursuivi pour prendre fin le 31 octobre 1996 ; que toutefois, le contrat, qui au demeurant n'est pas produit à la procédure, et à supposer qu'il ait régulièrement été passé pour un surcroît démontré d'activité, ne répond pas aux conditions conventionnelles applicables, savoir aux dispositions de l'article 14-1 de la convention collective des HCR, qui prévoient que l'extra qui se voit confier par le même établissement des missions pendant plus de 60 jours dans un trimestre peut demander la requalification ; qu'il ressort en effet, des bulletins de paie que Mme Y Y s'est vue confier des missions pour les mois de mars, avril, mai, juin, juillet, août, septembre et octobre 1996, très précisément du 14 mars au 31 octobre 1996, pour des durées, respectivement, de 91 H, 136 H, 148 H, 134 H, 68 H, 40 H, 136 H et 132 H, ce qui ramené à une valeur jour, excède manifestement la durée de 60 jours dans le même trimestre ; qu'il apparaît également, et curieusement, qu'un autre contrat d'extra ait été passé à compter du 5 septembre 1996, ainsi que mentionné sur le bulletin de paie de novembre, alors que celui délivré pour octobre laisse apparaître une date d'entrée toujours fixée au 14 mars 1996 ; qu'un tel chevauchement de contrat à durée déterminée est illicite ;

Considérant que par ailleurs, si selon l'article D.121-2 du Code du Travail, il est prévu que le secteur de l'hôtellerie permet le recours aux contrats dits d'usage, le caractère temporaire de l'emploi de Mme Y Y n'est pas établi ; et ce quand bien même la convention collective fait mention de qu'il est d'usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée ; qu'il est dès lors, indifférent que l'intéressée ai ensuite été engagée par des contrats saisonniers respectant les conditions de délai, notamment de plafond maximum de neuf mois, inhérentes à ce type de contrat ;

Qu'il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande de requalification ;

Considérant que Mme Y Y a droit au paiement de l'indemnité prévue par l'article L.122-3-8 du Code du Travail, laquelle sera fixée en l'occurrence à un mois de salaire ; que la détermination de cette indemnité dépendant du montant du salaire, et celui-ci étant fonction des autres demandes de nature salariale, il y a lieu de surseoir à statuer sur le montant chiffré de cette demande ;

SUR LE RAPPEL DE SALAIRE

Considérant que pour s'opposer à la demande de rappel de salaire, la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD soutient que les salaires figurant sur la grille de salaires annexée au procès-verbal de la réunion du 6 1992 ne peuvent constituer un engagement unilatéral de l'employeur, dès lors qu'ils n'ont été appliqués que sur acceptation par les salariés par avenant à leur contrat ; que ladite grille de salaires annexée au procès-verbal de négociation du même jour, ne peut être interprétée indépendamment de celui-ci ; que ce procès-verbal traite du salaire de substitution des salariés payés au pourcentage suite à la dénonciation des accords collectifs définissant ce mode de rémunération ; que la grille ne mentionne pas le terme de salaire minimum garanti, sauf pour rappeler l'ancien minimum contractuel garanti des salariés payés au pourcentage (7.767 Francs pour un chef de rang) ; que dans ces conditions, ladite grille du 6 février 1992 ne peut s'analyser comme

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emportant engagement de l'employeur à payer aux futurs salariés un salaire minimum par catégorie alors que ce terme ne figure pas dans cette grille et que le procès-verbal du 6 février 1992 ne traite que du salaire de substitution des salariés payés au pourcentage ;

Que Mme Y Y réclame de fait l'alignement de son salaire sur celui des salariés ayant accepté par voie d'avenant en avril 1992, les salaires figurant sur cette grille annexée au procès-verbal de négociati9n ; qu'il y a lieu de constater que le niveau de salaire conventionnel des salariés pay.au pourcentage était en 1991 de 12.358 Francs et que le minimum garanti contractuel était de 7.767 Francs ; que constituait un avantage acquis la différence entre ce niveau de salaire conventionnel et cet ancien minimum garanti contractuel, soit 4.591 Francs pour les chefs de rang ; que l'avantage acquis étant incorporé au contrat de travail, la signature d'un avenant ne fait perdre à l'avantage acquis sa nature que lorsqu'il est supprimé et non lorsqu'il est modifié ; que le nouveau salaire contractuel des salariés anciennement payés au pourcentage et présents lors de la dénonciation des accords était de 12.000 Francs à compter d'avril 1992 ; que ce nouveau salaire contractuel intégrait à hauteur de 4.233 Francs les avantages acquis résultant de la dénonciation des accords ;

Qu'en conséquence, le nouveau salaire contractuel des salariés présents en 1991 n'emportait pas suppression des avantages acquis mais modification de ceux-ci ; que Mme Y Y n'étant pas présente au moment de la dénonciation des accords, n'est donc pas dans une situation identique à celle des salariés présents lors de la dénonciation des accords ;

Qu'elle estime, à titre subsidiaire, qu'il y a lieu de dire que l'intégration dans le salaire de base d'une partie des avantages acquis résultant de la dénonciation d'un accord constitue un élément objectif justifiant une disparité de traitement entre les salariés présents à la date de dénonciation de l'accord et ceux embauchés ultérieurement ;

Mais considérant que comme le fait valoir Mme Y Y, il ressort des négociations ayant abouti à la réunion du 6 février 1992, que la grille de rémunération qui était annexée au procès-verbal de cette réunion, constitue un engagement unilatéral de l'employeur de respecter des salaires minimum ; qu'en effet, les accords et usages en vigueur en matière de rémunération du personnel ont été dénoncés en novembre 1991, ce qui n'et pas contesté, et ce dont font état les divers avenants conclus avec les salariés en fonction, en février 1992 ; et alors qu'aucun desdits avenants ne prévoit un salaire inférieur aux rémunérations prévues par la grille ; que la circonstance selon laquelle un avenant particulier a été conclu avec les salariés concernés, est indifférente, dès lors que tous les avenants prévoient des salaires conformes à cette grille ; que de même le fait que le terme de salaire minimum ne figure pas dans la grille importe peu, dans la mesure où les sommes mentionnées sont l'expression d'un tel minimum ; et alors qu'est indiqué par voie de comparaison l'ancien salaire minimum garanti pour chaque emploi ; qu'enfin, le fait que ladite grille de rémunération soit simplement annexée à un procès-verbal de réunion est sans incidence puisque celui-ci est la concrétisation des négociations menées entre les parties présentes, dont la représentativité n'est au demeurant pas critiquée ; que de surcroît, l'accord ultérieur, du 22 septembre 1994, ne se prononce pas sur cette question du salaire garanti ou de barème minimum ;

Considérant que l'argument opposé par la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD de la notion d'avantage individuel acquis est dénué de pertinence ; qu'en effet, quand bien même ladite grille s'appliquerait au personnel bénéficiaire des accords dénoncés, rien ne s'oppose à ce qu' elle s'applique à tout le personnel se trouvant dans une situation identique, dès lors que la dénonciation portait précisément sur un avantage accordé à la collectivité des salariés ; que Mme Y Y n'est pas contreditL,qui indique que la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD n'a pas continué

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à rémunérer suivant le système du pourcentage les salariés en fonction au 6 février 1992, auxquels il n'a pas été proposé d'avenant ; que faute de stipulation contractuelle expresse, le système de rémunération au pourcentage était collectif, et non d'ordre individuel ;

Considérant que par ailleurs, alors que Mme Y Y apporte des éléments de nature à caractériser une inégalité de rémunération par rapport à d'autres de ses collègues exerçant les mêmes fonctions, la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD ne rapporte pas la preuve de l'existence d' éléments objectifs de nature à justifier une différence de traitement ; qu'en effet, à l'expiration du délai de 15 mois prévu par l'article L.132-8 du Code du Travail, la rémunération des salariés en fonction en 1991 a diminué, ce qui a entraîné la conclusion d'avenants aux contrats de travail ; que dans ces conditions, la Société THE RITZ HÔTEL LTD ne peut se prévaloir, pour justifier de la différence de traitement entre Mme Y Y et les salariés en fonction en 1991, de ce que ces derniers auraient conservé partiellement des avantages individuels acquis, la remise en cause de ces avantages, par voir d'avenant au contrat de travail, leur faisant précisément perdre cette qualification ;

Qu'en outre, l'accord d'entreprise du 22 septembre 1994 n'établit aucune distinction quant à la date d'embauche, l'article 10 stipulant que chaque salarié perçoit depuis le 1" avril 1992 un salaire appelé "salaire de base", qui est déterminé lors de l'embauche, et qui peut varier en fonction d'augmentations générales ou personnelles ;

Qu'en tout état de cause, la disparité de situation suivant que les salariés étaient ou non présents en 1991 n'est pas de nature à justifier une différence de traitement entre salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale, étant observé que l'ancienneté est prise en compte par une prime spécifique et que le principe "à travail égal, salaire égal" n'est pas limité à des situations dans lesquelles les salariés effectuent simultanément un travail égal pour un même employeur ;

Considérant que contrairement à ce que prétend la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD, il n'y a pas eue simple modification d'un avantage acquis, mais suppression de celui-ci, ce qu'elle reconnaît d'ailleurs à tout le moins être partielle ; que l'argument tiré de ce que l'intégration dans le salaire de base d'une partie des avantages acquis résultant de la dénonciation de l'accord constituerait un élément objectif légitimant l'inégalité de traitement salarial entre salariés présents à la date de la dénonciation de l'accord et ceux embauchés ultérieurement, est inopérant ; dès lors qu'il y a identité de travail effectué ;

Qu'il s'en suit qu'il y a lieu de faire droit à la demande de Mme Y Y de rappel de salaires et congés payés incidents ;

Considérant qu'il en sera de même pour ce qui est du 13ème mois, à compter de l'année 1997, par application de l'article 11 de l'accord u 22 septembre 1994, et de la prime d'ancienneté prévue par l'article 12.B dudit accord ; enfin du paiement des congés d'ancienneté, prévus par l'article 15 ;

Considérant que par contre, s'agissant des jours fériés et des jours de 1er mai, que Mme Y Y indique être prévus par l'article 17 de l'accord de septembre 1994, elle n' en produit pas le texte ; que comme relevé par le premier juge, dès lors que Mme Y Y ne fournit pas d'élément de nature à établir qu'elle remplit les conditions pour en revendiquer le paiement, il y a lieu de la débouter de cette demande ; et de confirmer le jugement de ce chef

Considérant que les demandes étant accueillies en leur principe, il y a lieu de renvoyer les parties à faire leurs comptes sur le chiffrage de celles-ci, sur les bases ci-dessus précisées ;

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SUR LES HEURES SUPPLEMENTAIRES

Considérant qu'il y a lieu de constater que Mme Y Y ne fait plus de demande à ce titre ; non plus qu'à celui des repos compensateurs ; ni dans ses écritures ni à la barre dans ses explications orales ;

Considérant qu'il en est de même en ce qui concerne la prime d'habillage ;

SUR LA RUPTURE

Considérant que pour s'opposer aux demandes, la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD expose que la rupture est motivée par sa lettre du 29 août 2001 qui fait état du refus de Mme Y Y d'accomplir ses vacations et de l'insuffisante disponibilité de celle-ci qui ne s'est pas présentée les jours indiqués pour exercer ses fonctions de femme de chambre ; que l'employeur n'avait à respecter aucun délai de prévenance, dès lors que le contrat étant requalifié, la salariée exerçait ses fonctions de manière continue ; qu'en tout état de cause, le délai de prévenance de 7 jours, voire de 3 jours, en cas de circonstances exceptionnelles, a été respecté, dans la mesure où il a été respectivement, de 4, 7 et 8 jours ; qu'enfin, Mme Y Y ne justifie pas de son préjudice ;

Considérant que Mme Y Y soutient que la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD a mis indûment un terme à ses vacations ; qu'ainsi, celle-ci a méconnu la nature du contrat qui est un contrat à durée indéterminée ; que la rupture est intervenue sans préavis, sans respect de la procédure et sans motif ;

Mais considérant que la lettre du 14 août 2001 de la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD aux termes de laquelle celle-ci met fin aux vacations de Mme Y Y, s'analyse en une lettre de rupture ; que cette lettre comporte un motif de rupture, tiré du refus de l'intéressée d'accomplir des vacations le 10 août, et les 18,21 et 22 août 2001, de même que de son indisponibilité ;

Considérant que s'agissant de refus des vacations, celui-ci est établi par la lettre de la supérieure hiérarchique de Mme Y Y (LE LAY) confirmée par voie d'attestation, et non utilement contestée par Mme Y Y ; que cependant, alors que la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD invoque elle-même le délai de prévenance des vacations, de 7 jours ou de 3 jours en cas de circonstances exceptionnelles, il ressort des éléments du dossier qu'alors que n'est pas démontrée la réalité de telles circonstances légitimant de recourir au délai de prévenance de trois jours, il est établi que le délai de sept jours n'a pas été respecté, tant pour ce qui est de la vacation du 10 août, demandée le 6, que de celles des 18, 21 et 22 août, demandées le 14 ; que le grief n'est donc pas fondé ;

Considérant que cependant, le reproche d'insuffisante disponibilité est établi dès lors que Mme Y Y n'a pas accompli lesdites vacations et ce faisant, ne s'est pas présentée à son poste pour exercer ses fonctions ; alors que de surcroît, le contrat étant requalifié en contrat à durée indéterminée, la salariée avait l'obligation de se tenir à disposition ; qu'en effet, Mme Y Y ne peut à la fois invoquer, à sa convenance selon les demandes qu'elle entend soutenir, le bénéfice des effets d'un contrat à durée déterminée d'extra et les avantages tirés d'un contrat à durée indéterminée ;

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Qu'il s'en suit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que Mme Y Y sera déboutée de sa demande d'indemnisation de la rupture ;

Considérant que Mme Y Y a droit toutefois au paiement de ses indemnités de rupture, savoir l'indemnité de préavis, de deux mois de salaires, et les congés payés incidents, et l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Qu'il sera sursis à statuer sur le montant chiffré desdites demandes en fonction de la détermination du salaire de base de l'intéressée ; que les sommes allouées à titre provisionnel, respectivement, de 3.000 Euros et de 3.500 Euros, seront cependant confirmées ;

Considérant que par ailleurs, la procédure n'ayant pas été respectée, dès lors que Mine Y Y n'a pas été convoquée à un entretien préalable, lui sera allouée une indemnité à ce titre, que la cour fixe à un mois de salaire brut ; étant précisé que cette demande participe de celle faite à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès lors que Mme Y Y se prévaut de l'absence de toute procédure ;

SUR LA DEMANDE DE L'ASSEDIC

Considérant que le licenciement étant fondé sur une cause réelle et sérieuse, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de l'ASSEDIC en remboursement des indemnités de chômage versées à la salariée ; que la demande de celle-ci d'indemnité en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile sera également rejetée ;

Considérant qu'il y a lieu de renvoyer la cause et les parties à l'audience du 10 octobre 2006 pour plaider ;

Considérant qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la remise des documents sociaux, et de réserver les dépens et l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

Reçoit la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD en son appel et Mme Y Y en son appel incident,

Déboute la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD de l'appel,

Confirme le jugement entrepris sur le principe de la requalification en contrat à durée indéterminée du contrat de Mme Y Y, et sur le principe de l'allocation d'une indemnité équivalente à un mois de salaire brut, en application de l'article L.122-3-8 du Code du Travail, Le confirme également en son principe pour ce qui est du rappel de salaires et congés payés incidents, de l'indemnité conventionnelle de 13ème mois à compter de 1997, de la prime conventionnelle d'ancienneté, des congés d'ancienneté, ainsi que sur le rejet de l'indemnité pour jours fériés et du 1er mai,

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Le confirme encore en son principe sur l'indemnité de préavis, les congés payés incidents et l'indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi que sur les indemnités provisionnelles allouées à ces titres,

Constate qu'il n'est plus fait de demande aux titres des heures supplémentaires, des repos compensateurs, et de la prime d'habillage,

Infirme le jugement sur le licenciement et l'indemnité en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et sur la remise des documents sociaux, Statuant à nouveau,

Dit le licenciement de Mme Y Y fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute Mme Y Y de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA SOCIÉTÉ THE RITZ HÔTEL LTD à payer à Mme Y Y une indemnité pour inobservation de la procédure, d'un montant d'un mois de salaires brut,

Déboute l'ASSEDIC DE L'EST FRANCILIEN de ses demandes, Sursoit à statuer sur le montant chiffré de l'indemnité allouée en application de l'article L.122-3-8 du Code du Travail, et de l'indemnité pour inobservation de la procédure, et sur la remise des documents sociaux, Renvoie les parties à faire leurs comptes sur le rappel de salaires et les autres demandes de nature salariale, au vu des principes ci-dessus définis dans les motifs, Renvoie la cause et les parties à l'audience du 10 octobre 2006 à 9 heures pour plaider,

Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à l'audience, Réserve l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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