SOC.PRUD'HOMMESJL
COUR DE CASSATION
Audience publique du 4 octobre 2005
Rejet
M. GILLET, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président
Arrêt n° 1755 F D
Pourvoi n° U 03-45.983
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la société Rema, venant aux droits des Assurances mutuelles d'Eure et Loir, dont le siège est Chartres,
en cassation d'un arrêt rendu le 12 juin 2003 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre B sociale), au profit de M. Bernard Y, demeurant Fontaine la Guyon, défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 juin 2005, où étaient présents M. Gillet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Morin, conseiller rapporteur, Mme Perony, conseiller, M. Funck-Brentano, conseiller référendaire, M. Maynial, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Morin, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ et de Lanouvelle, avocat de la société Rema, de Me Copper-Royer, avocat de M. Y, les conclusions de M. Maynial, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu que M. Y, engagé comme fondé de pouvoir par la société d'Assurances mutuelles d'Eure et Loir aux droits de laquelle vient la société Rema, a été licencié pour faute grave le 13 mars 1999 après mise à pied conservatoire ; qu'à cette date, la société employait 14 personnes ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 2003) d'avoir condamné l'employeur au paiement de diverses sommes consécutives à cette rupture, alors, selon le moyen
1°/ que l'article 90 de la Convention collective des sociétés d'assurance prévoit que lorsqu'un membre du personne est convoqué par l'employeur et informé que le licenciement pour faute ou insuffisance professionnelle est envisagé à son égard, il a la faculté de demander la réunion d'un conseil constitué de trois représentants de l'employeur et de trois représentants du personne de l'établissement ( délégués du personnel, membres du comité d'entreprise, délégué syndicaux, ou représentant syndicaux au comité d'entreprise ou d'établissement)" la lettre de convocation mentionnant cette faculté, et que lorsque l'employeur envisage à l'issue de l'entretien préalable un licenciement pour faute, il doit obligatoirement réunir ce conseil ; qu'en énonçant pourtant, pour décider que la société Rema, qui ne pouvait être légalement tenue de mettre en place qu'un délégué du personnel titulaire et un suppléant, avait l'obligation de respecter la procédure conventionnelle de consultation d'un conseil composé de représentants du personnel et de représentants de l'employeur, que le chiffre de trois devait être considéré comme un maximum, aucune disposition de la convention ne réservant la réunion du conseil aux salariés des entreprises comportant au moins trois délégués du personnel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2°/ que le nombre des délégués du personnel, qui doit être calculé en fonction de l'effectif d'une entreprise lorsque celle-ci ne comporte qu'un seul établissement, ne peut, en l'absence de dispositions conventionnelles plus favorables être supérieur à celui qui est déterminé en application des dispositions de l'article R. 423-1 du Code du travail ; qu'en affirmant, pour décider que la société Rema, dont l'effectif était de 14 salariés, avait l'obligation de respecter la procédure conventionnelle de consultation d'un conseil composé de trois représentants du personnel et de trois représentants de l'employeur, en l'absence de toute disposition conventionnelle ou accord d'entreprise exprès relatif à l'accroissement du nombre légal de délégués du personnel, que si le nombre de délégués du personnel prévu par la loi ne pouvait être restreint, il pouvait être augmenté par accord d'entreprise, la cour d'appel a violé les articles 90 de la Convention collective des sociétés d'assurance et L. 426-1 du Code du travail ;
3°/ quetrès subsidiairement, si la consultation de l'organisme chargé par la convention collective de donner son avis sur la qualification de faute est une condition nécessaire du licenciement pour faute, le licenciement prononcé en l'absence de cette consultation n'est pas à ce seul titre dépourvu de cause réelle et sérieuse ; la procédure instituée par la convention collective prévoyant la consultation, préalablement au licenciement pour faute d'un conseil composé paritairement de représentants de l'employeur et des salariés, avec la possibilité pour le salarié d'être entendu par le conseil et de consulter les éléments de son dossier 48 heures auparavant, constitue une garantie de fond et que du fait du non respect de cette procédure conventionnelle, le licenciement de M. Y pour fautes graves est dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 90 de la Convention collective des sociétés d'assurance et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu que la procédure prévue par l'article 90 de la convention collective applicable selon lequel en cas de licenciement pour faute l'employeur doit obligatoirement consulter un conseil composé de trois représentants du personnel, et de trois représentants de l'employeur constitue une garantie de fond dont la convention ne limite pas l'application en fonction du nombre de représentants du personnel dans l'entreprise ;
D'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision en constatant que le salarié avait été privé de cette garantie de fond du fait de l'employeur qui n'avait pas mis en place les délégués du personnel alors qu'il y était tenu ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Rema aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Rema à payer à M. Y la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille cinq.