Cass. soc., 17-05-2005, n° 02-47.541, publié , Rejet.



SOC.PRUD'HOMMESLM

COUR DE CASSATION

Audience publique du 17 mai 2005

Rejet

M. SARGOS, président

Arrêt n° 1086 FS P+B

Pourvoi n° S 02-47.541

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par

1°/ l'AGS, dont le siège est Paris,

2°/ l'UNEDIC, en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile au Levallois-Perret,

en cassation d'un arrêt rendu le 15 octobre 2002 par la cour d'appel de Paris (22e chambre, section B), au profit

1°/ de M. Aladin Y, demeurant Paris,

2°/ de Mme Monique X, domiciliée Paris, prise en qualité de mandataire-liquidateur de la société à responsabilité limitée Sérénade productions, défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 mars 2005, où étaient présents M. Sargos, président, Mme Mazars, conseiller rapporteur, M. Boubli, conseiller doyen, MM. Chagny, Bouret, Bailly, Chauviré, Gillet, Mmes Morin, Pérony, conseillers, Mmes Lebée, Andrich, MM. Funck-Brentano, Leblanc, Mmes Slove, Bobin-Bertrand, Manes-Roussel, Farthouat-Danon, Divialle, conseillers référendaires, M. Duplat, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Mazars, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS et de l'UNEDIC (AGS-CGEA Ile-de-France est), de la SCP Laugier et Caston, avocat de M. Y, les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique

Attendu que M. Y, comédien, a été engagé par la société Sérénade productions pour interpréter un rôle dans un long métrage, selon contrat d'artiste du 6 juin 1996 qui prévoyait qu'il percevrait, en plus du salaire, une rémunération avant amortissement de 4 % de tout financement servant à monter le film ; qu'ayant perçu le seul salaire fixe, l'artiste a fait convoquer la société de production devant la juridiction prud'homale, le 17 juin 1999, pour obtenir paiement d'une somme correspondant au pourcentage de 4 % des sommes encaissées par le producteur à titre d'avances sur recettes ; que la société Sérénade productions a été mise en liquidation judiciaire le 15 novembre 1999, l'AGS et l'UNEDIC ont été appelées en la cause ;

Attendu que l'AGS et l'UNEDIC font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 2002) d'avoir fixé à une certaine somme au passif de la société de production la créance de M. Y à titre de rémunération avant amortissement du film, et d'avoir dit la décision opposable à l'AGS tenue dans les limites de sa garantie, alors, selon le moyen

1°/ que les sommes dues à un comédien à la suite de sa participation au tournage d'un film ne constituent pas des salaires dès lors que la présence physique de l'artiste n'est plus requise pour exploiter l'enregistrement de sa prestation et que cette rémunération n'est en rien fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation ; qu'en retenant, pour dire que la somme due au comédien à titre de rémunération avant amortissement du film devait être garantie par l'AGS, que n'était pas renversée la présomption de contrat de travail instituée en faveur des artistes du spectacle par l'article L. 762-1 du Code du travail, la cour d'appel, qui a omis de rechercher, comme elle y était invitée, si cette créance n'était pas née après que la présence de l'intéressé ne fut plus requise, n'a pas caractérisé l'existence d'un salaire et a, ainsi, privé sa décision de base légale au regard des articles L. 762-2 et L. 143-11-1 du Code du travail ;

2°/ que le contrat de travail stipulait que l'artiste avait droit à une rémunération avant amortissement du film égale à 4 % du montant du financement du montage et à une rémunération supplémentaire égale à 2 % des recettes après amortissement ; qu'en disant que l'avance sur recette du Centre national de la cinématographie et les droits de diffusion acquis par les sociétés Canal+ et TPS, versés à l'employeur, entraient dans la rémunération avant amortissement du film, sans vérifier si ces sommes avaient été destinées au montage du film et si elles avaient été versées avant l'amortissement de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, selon l'article L. 143-11-1 du Code du travail, en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaires, l'AGS garantit le paiement des sommes dues en exécution du contrat de travail ; que, d'autre part, il résulte de l'article L. 762-1 du même Code que le contrat par lequel un producteur s'assure le concours d'un artiste en vue de sa production est présumé être un contrat de travail quels que soient le mode ou le montant de la rémunération ;

D'où il suit que la cour d'appel a pu décider que la rémunération avant amortissement du film qui était due à M. Y entrait dans le champ de la garantie de l'AGS ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'AGS et l'UNEDIC (AGS-CGEA Ile-de-France est) aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne l'AGS et l'UNEDIC à payer à M. Y la somme de 2 200 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille cinq.