Cass. soc., 29-02-2000, n° 98-43.145, inédit au bulletin, Rejet



Cour de Cassation

Arrêt du 29 février 2000

société Nationale des Chemins de Fer Français (SNCF)

c/ M. Joseph ... et autres

Président  M. GELINEAU-LARRIVET

RÉPUBLIQUE   FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

   LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

   Sur les pourvois formés par la société Nationale des Chemins de Fer Français (SNCF), dont le siège social est Paris, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

   en cassation des arrêts rendus le 1er avril 1998 par la cour d'appel de Montpellier (chambre sociale), au profit

   1 / de M. Joseph ..., demeurant Ille-sur-Tet,

   2 / de Mme Monique ..., demeurant Canet-en-Roussillon,

   3 / de M. Pere Iu ..., demeurant Vernet-les-Bains,

   4 / de M. Alain ..., demeurant Perpignan,

   5 / de M. Etienne ..., demeurant Ria,

   6 / de M. Marcel ..., demeurant Espira de l'Agly,

   7 / de M. Daniel ..., demeurant Caudies de Fenouilledes,

   8 / de M. Jean ..., demeurant Theza,

   9 / de M. Joseph ..., demeurant HLM Méditerranée

    Perpignan,

   10 / de M. François ..., demeurant Perpignan,

   11 / de M. Jean-Pierre ..., demeurant Ceret,

   12 / du syndicat CGT, dont le siège est Perpignan Cedex, pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

   défendeurs à la cassation ;

   LA COUR, en l'audience publique du 11 janvier 2000, où étaient présents M. Gélineau-Larrivet, président, M. Waquet, conseiller rapporteur, MM. ..., ..., ..., ..., ..., conseillers, M. ..., Mme ..., M. Richard ... ... ..., Mme ..., MM. ... ... ..., ..., Mme ..., conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

   Sur le rapport de M. Waquet, conseiller, les observations de Me ..., avocat de la société Nationale des Chemins de Fer Français, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

   Vu leur connexité, joint les pourvois n° W 98-43.145, n° X 98-43.146, n° Y 98-43.147, n° Z 98-43.148, n° A 98-43.149, n° B 98-43.150, n° C 98-43.151, n° D 98-43.152, n° E 98-43. 153, n° F 98-43.154, n° H 98-43.155 ;

   Attendu que le 24 juin 1994, les syndicats CGT et CFDT ont déposé à la SNCF un préavis de grève concernant la période du 30 juin 1994 à 0 heure au 9 juillet 1994 à 8 heures ; que d'autres préavis de grève ont été ensuite déposés par les syndicats CGT, CFDT et FO ;

   que M. ... et 10 autres agents ayant cessé le travail le 8 juillet 1994, la SNCF leur a signifié que cet arrêt de travail ne constituait pas l'exercice normal du droit de grève et qu'en conséquence elle procédait à une retenue de salaire calculée en fonction de la durée d'absence et non des dispositions de l'article L. 521.6 du Code du travail ;

   que les intéressés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'annulation de la sanction prise à leur encontre et un rappel de salaires ;

   Sur le premier moyen

   Attendu que la SNCF fait grief aux arrêts confirmatifs attaqués (Montpellier, 1er avril 1998) d'avoir fait droit à cette demande, alors, selon le moyen, que le droit de grève dans les services publics n'est exercé normalement que si le préavis détermine le moment précis, qui doit être commun à tous les membres du personnel, de l'arrêt de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a déclaré licite un mouvement de grève, déclenché par des préavis successifs, sans rechercher, alors que cela lui avait été demandé par la SNCF, si les arrêts de travail avaient bien tous débuté le même jour, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 521-3 et L. 521-4 du Code du travail ;

   Mais attendu que si, dans les services publics, la grève doit être précédée d'un préavis donné par un syndicat représentatif et si le préavis, pour être régulier, doit mentionner l'heure du début et de la fin de l'arrêt du travail, les salariés, qui sont seuls titulaires du droit de grève, ne sont pas tenus de cesser le travail pendant toute la durée indiquée par le préavis ; que, dès lors, les juges du fond, qui ont constaté la régularité du préavis donné le 24 juin 1994, ont exactement décidé que l'arrêt de travail intervenu le 8 juillet 1994, c'est-à-dire au cours de la période mentionnée par le préavis, constituait l'exercice normal du droit de grève par les agents de la SNCF ; que le moyen n'est pas fondé ;

   Sur le second moyen

   Attendu que la SNCF reproche aussi aux arrêts attaqués de l'avoir condamnée à payer un rappel de salaire, alors, selon le moyen, que l'exercice du droit de grève par les personnels des services publics entraîne une retenue égale à 1/30ème du salaire mensuel, lorsque la cessation du travail a été supérieure à une demi-journée, mais n'a pas excédé une journée entière ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a décidé que les premiers juges avaient procédé à une juste estimation de la retenue qui aurait dû être pratiquée sur le salaire de M. ..., alors qu'ils avaient effectué le calcul en retenant 1/30ème de la journée de salaire et non le montant intégral de la journée, a méconnu les dispositions de l'article L. 521.6 du Code du travail et l'article 2 de la loi du 19 octobre 1982 ;

   Mais attendu que la cour d'appel ayant appliqué la retenue prévue par le règlement intérieur de la SNCF, dit P.S.2. régissant les retenues sur salaires pour faits de grève, le moyen est inopérant ;

    PAR CES MOTIFS

   REJETTE les pourvois ;

   Condamne la société Nationale des Chemins de Fer Français aux dépens ;

   Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf février deux mille.