Cour de Cassation
Arrêt du 11er juillet 2000
M. Philippe ...
c/ M. ...
Président M. WAQUET conseiller
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Philippe ..., demeurant Raye-sur-Authie,
en cassation d'un arrêt rendu le 18 décembre 1997 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), au profit de M. ..., demeurant Hesdin,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 juin 2000, où étaient présents M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire rapporteur, MM. ..., ..., conseillers, Mmes ..., ..., conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les deux moyens réunis
Vu l'article L. 122-14-3 du Code du Travail ;
Attendu que M. ... a été engagé, le 14 novembre 1988, par M. ..., en qualité de clerc 2e catégorie ; que le 10 mars 1992, son médecin traitant lui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 14 mars suivant ; que le 12 mars, pendant cet arrêt de travail, le salarié s'est rendu à Paris afin d'assister à une séance de cours du centre de formation professionnelle notariale ; que le même jour, l'employeur a fait procéder à une visite de contrôle à son domicile par un médecin qui a constaté l'absence du salarié ; que le 16 mars suivant, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave ; que, contestant le bien-fondé de cette mesure, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que, pour dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts, la cour d'appel a énoncé que M. ... se trouvait en arrêt d'activité pour motif de maladie le jeudi 12 mars 1992 ; qu'il est établi par une correspondance du centre de formation professionnelle notariale de Paris, que M. ... a 'participé au cours' de cette journée 'dans le cadre de la semestrialité immobilier' ; que l'envoi du certificat médical prescrivant un arrêt de travail de cinq jours à compter du 10 mars 1992 aurait constitué cependant une justification d'absence administrativement valable même pour un cours obligatoire ; qu'en se déplaçant de son domicile à Paris, alors qu'il n'était en rien tenu de le faire, et en s'exposant à la fatigue d'une journée de cours, le demandeur a manifesté qu'il était apte à prendre son poste le lendemain ; que le certificat médical invoqué se trouve dès lors privé de toute valeur quant à la réalité d'une indisponibilité de travail le 13 mars 1997 ; qu'il convient en conséquence de dire non abusif le licenciement de M. ..., sans néanmoins attacher à son comportement le caractère d'une faute grave, M. ... ne démontrant pas que le maintien du salarié dans son étude pendant la durée du préavis aurait mis en péril ses intérêts d'employeur ;
Attendu, cependant, que le licenciement ayant été prononcé pour faute grave avait nécessairement un caractère disciplinaire, ce dont il résultait que la cour d'appel devait constater l'existence d'une faute ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié se trouvait en période de suspension de son contrat de travail et que les faits qu'elle avait constatés, s'ils pouvaient entraîner la perte du droit à indemnisation complémentaire, n'étaient pas constitutifs d'une faute justifiant un licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 décembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne M. ... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille.