Cass. soc., 30-04-2003, n° 00-22.328, F-D, Rejet



SOC.

C.F

COUR DE CASSATION

Audience publique du 30 avril 2003

Rejet

M. SARGOS, président

Pourvoi n° V 00-22.328

Arrêt n° 1292 F D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par la société Semvat, dont le siège est Toulouse,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 septembre 2000 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre civile), au profit

1°/ de M. Jean-Luc Y, demeurant Muret,

2°/ du syndicat Sud transports urbains, dont le siège est Toulouse,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 11 mars 2003, où étaient présents M. Sargos, président, M. Coeuret, conseiller rapporteur, M. Bailly, conseiller, Mmes Lebée, Bobin-Bertrand, conseillers référendaires, M. Legoux, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Coeuret, conseiller, les observations de Me Cossa, avocat de la société Semvat, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat du syndicat Sud transports urbains, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 29 février 2000, le syndicat Sud transports urbains 31 a adressé à la direction de la société Semvat un préavis de grève indiquant que, conformément aux dispositions de l'article L. 521-3 du Code du travail, il déposait un préavis de grève de 24 heures reconductible, débutant le 6 mars 2000 à 0 heures, concernant l'ensemble du personnel de la Semvat et les personnes appelés à le remplacer ; que ledit préavis indiquait en outre, en tant que modalités, que l'arrêt de travail consisterait en 59 minutes dans la période horaire de 4 heures 35 à "25 heures 30" ; que la société a saisi le juge des référés afin qu'il annule le préavis ainsi libellé au motif que les modalités de la grève qu'il fixait donnaient à chacun la possibilité de faire 59 minutes de grève à n'importe quel moment entre 4 heures 30 et 1 heure 30 après minuit, ce, contrairement aux prescriptions légales, ce qui était de nature à constituer un trouble manifestement illicite ;

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué (Toulouse, 14 septembre 2000) d'avoir réformé l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Toulouse du 3 mars 2000 en ce qu'elle avait, se fondant sur le trouble manifestement illicite découlant des modalités contenues dans le préavis de grève adressée le 29 février 2000 par le syndicat Sud transports urbains 31 à la Semvat, prononcé la nullité de ce préavis alors, selon le moyen

1°/ que, ayant écarté le seul moyen invoqué par le syndicat Sud transports urbains 31 au soutien de son appel contre l'ordonnance qui avait annulé le préavis de grève litigieux et ayant relevé que ledit syndicat ne contestait pas l'illicéité des modalités de la grève en cause, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile, en infirmant la décision qui lui était déférée, en la seule considération que les modalités de la grève envisagée, évoquée uniquement dans les conclusions de confirmation de la Semvat, ne constituaient pas une pratique illégale ;

2°/ que, le droit de grève dans les services publics n'étant exercé normalement que si le préavis de grève détermine l'heure précise, commune à tous les membres du personnel, de l'arrêt de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 521-3 et L. 521-4 du Code du travail en se bornant à relever, pour décider que les modalités envisagées par le préavis litigieux ne constituaient pas une pratique illégale, que les salariés pouvaient faire grève pendant une durée inférieure à la totalité de la période visée au préavis, sans rechercher si, comme l'avait relevé le premier juge et comme le faisait valoir devant elle la Semvat, ces modalités n'annonçaient pas une grève par échelonnements successifs ou par roulements concernés dont l'illégalité justifiait l'annulation du préavis ;

Mais attendu que si, dans les services publics, la grève doit être précédée d'un préavis donné par un syndicat représentatif et si ce préavis, pour être régulier, doit mentionner l'heure du début et de la fin de l'arrêt de travail, les salariés qui sont seuls titulaires du droit de grève ne sont pas tenus de cesser le travail pendant toute la durée indiquée par le préavis ; que, dès lors, les juges du fond qui ont constaté que le préavis concernait une période précisément délimitée et qu'il ne prévoyait la grève des salariés qu'à l'intérieur de cette période ont, sans violer l'article 4 du nouveau Code de procédure civile et sans commettre de dénaturation, exactement décidé que les modalités fixées par le préavis déposé par le syndicat Sud transports urbains 31 étaient licites ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Semvat aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du syndicat Sud transports urbains ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente~avril~deux mille trois.